5 conférences (seules sont affichées les conférences pour lesquelles un texte a été fourni).

> Appréciation de l'équilibre émotionnel du chiot grâce à la grille 4A

Claude BEATA
Dip Ecawbm
Toulon France

I-Introduction

Une des difficultés de la médecine comportementale est parfois de manquer d’instruments de mesure qui permettent de donner des indications précises, d’orienter un diagnostic et d’évaluer une évolutionLa grille 4A a été élaborée, il y a maintenant bientôt 20 ans, justement pour pallier ces carences. Elle permet une évaluation rapide de l’équilibre comportemental du chien, et encore plus du jeune chien. Composée de 20 questions réparties en 4 catégories, elle permet d’obtenir un score global, mais également 4 sous-scores qui évaluent les 4 facettes de cet équilibre :

  • agressivité (hiérarchie) ;
  • anxiété ;
  • attachement ;
  • autocontrôles.

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Figure 1

Plus le score est élevé, moins le chien a de chances d’être en équilibre. La grille est destinée à être utilisée par tout vétérinaire, sans formation nécessaire en comportement. La grille doit être remplie au cours de l’entretien avec le propriétaire, mais c’est le vétérinaire qui doit choisir le score pour chaque item.

II- La démarche

La démarche est simple. Elle commence par quatre questions au propriétaire du chien (et c’est valable déjà avec les chiots).

  1. Votre chien est-il parfois agressif ?
  2. Votre chien a-t-il des peurs infondées ou excessives ?
  3. Les rapports affectueux avec votre chien sont-ils satisfaisants ?
  4. Votre chien a-t-il des quarts de folie, des moments d’excitation difficilement supportables ?

Si vous obtenez 4 « NON », ce n’est pas la peine d’aller chercher beaucoup plus loin et vous avez toutes chances d’avoir en face de vous un animal normal. Vous venez rapidement d’explorer les 4 axes qui fondent l’équilibre d’un animal.

  • Agressivité
  • Anxiété
  • Attachement
  • Autocontrôles

Ce qui se passe très régulièrement, c’est que, en ayant posé la question ou spontanément, vous apprenez qu’au moins un des axes suscite des difficultés et il est parfois difficile de savoir quoi en faire.

Nous avons donc construit un outil pour permettre au praticien d’aller plus loin, de confirmer ses intuitions, et surtout de pouvoir présenter au propriétaire à la fois un résultat objectif chiffré, la possibilité d’une représentation graphique permettant en un clin d’œil d’avoir la « forme » de l’animal et aussi de pouvoir visualiser son évolution au fur et à mesure de la répétition, chaque mois par exemple, des mesures.

III- La grille et ses questions

Chacun des axes est évalué à l’aide de 5 questions comportant chacune 5 possibilités scorées 0, 1, 2, 3 et 5. Cela permet d’obtenir un score allant de 0 à 100. 0 est le score obtenu par un chien parfait pour cette grille, 100 le chien présentant un déséquilibre maximal sur chacun des axes. Pour le dire plus mathématiquement, le score 4A mesure l’écart à l’équilibre et cela peut s’exprimer en pourcentage : un animal qui a 25 comme score est « équilibré » à 75% ou déséquilibré à 25%. Les scores obtenus en dépistage sont rarement très élevés et cela peut aussi être rassurant. La représentation graphique permet aussi de comprendre dans quel axe l’animal est le plus déséquilibré. La représentation graphique non seulement permet d’imager le déséquilibre mais permet aussi de suivre la progression. Si l’animal s’améliore, chaque nouvelle aire de couleur différente se superposera à l’aire initiale et permettra de mesurer les progrès.

IV- Validation

Un travail de validation a été commencé autour de cette grille. Une première partie a vérifié la corrélation entre un vétérinaire généraliste et un vétérinaire comportementaliste et les taux de corrélation Cela a donné lieu à un mémoire pour le diplôme de vétérinaire comportementaliste qui a montré que, après certains ajustements, les taux de corrélation devenaient de bonne qualité. Les différentes études entreprises depuis avec la 4A ont démontré sa pertinence

V- Interprétations

Chaque score doit être lu en fonction des caractéristiques individuelles du cas mais nous avons une grille de lecture générale et simplifiée.

Tout score global supérieur ou égal à 20 mérite une attention particulière. Cela veut dire que le chien n’est équilibré qu’à 80% et il y a donc soit de nombreuses zones de vulnérabilité soit une seule mais sévère. Pour chacun des scores (attachement, autocontrôles, anxiété, agressivité) entre 0 et 7, le paramètre paraît normal, entre 7 et 12 il est à surveiller, il devient anormal entre 12 et 17 et souligne un déséquilibre extrême entre 17 et 25.

VI- Utilisations et technique

Avant tout, la grille 4A a comme objectif de permettre l’évaluation de (jeunes) chiens présentés à l’occasion de consultation de routine (vaccination ou affections bénignes). Elle permet aussi de suivre l’évolution d’un animal et de vérifier la pertinence des premières interventions que ce soit l’utilisation de phéromones et de nutraceutiques ou les conseils. Le vétérinaire est le premier interlocuteur des propriétaires et cela fait partie intégrante de son métier que de poser la limite entre ce qui est normal et ce qui est pathologique. La zoopsychiatrie est une discipline récente dont les fondements théoriques n’ont pas été enseignés à la plupart des vétérinaires en exercice. Difficile alors de leur demander de savoir reconnaître ce qui relève de la simple éducation ou ce qui signe un état pathologique.

La grille 4A peut leur permettre de formaliser leur approche et de pouvoir mettre des chiffres et une représentation sur ce qui n’était jusqu’alors que des sensations souvent justifiées. La grille 4A n’est pas un outil de diagnostic. Bien sûr, si un chien présente un très grand déséquilibre dans le secteur des autocontrôles et uniquement là, cela peut venir renforcer l’hypothèse d’un syndrome hypersensibilité-hyperactivité mais généralement le praticien capable de le diagnostiquer l’aura déjà pris en charge. En revanche, la grille 4A peut être un outil permettant de référer des cas en s’appuyant sur le pouvoir démonstrateur des chiffres pouvant convaincre le client que son animal présente un déséquilibre qu’il faut régler.

Certains points techniques dans le remplissage de la grille sont à souligner :• Les questions sont posées par le vétérinaire au propriétaire et il s’agit souvent de décider ensemble, au cours d’un échange, quelle est la réponse la plus adéquate.• En cas de doute, il est toujours recommandé de choisir le score le plus sévère : il vaut mieux connaître le résultat le plus « pessimiste » et le suivre.• Pour que le suivi ait plus de sens, il est intéressant de faire des mesures à intervalles réguliers, par exemple tous les mois en cas de forte suspicion ou de prise en charge précoce, tous les 3 à 6 mois au cours du développement et tous les ans ensuite pour dépister un éventuel dérapage.

Depuis son lacement, la grille a été de plus en plus utilisée. Elle a montré son intérêt dans le dépistage précoce des troubles comportementaux. Dans une étude sur 30 chiens, il a ainsi été montré que sur les 10 chiots qui avaient obtenu un score supérieur à 20, 9 présentaient des troubles du comportement à l’âge adulte, la dixième ayant été prise en charge très tôt avec des conseils appropriés [1]. Dans une autre étude, l’existence d’un score anormal de la partie Autocontrôles chez les chiens ayant avalé des corps étrangers a été statistiquement vérifiée [2]. La grille 4a a aussi été utilisée pour le suivi de l’équilibre émotionnel des chiens en médiation animale [3] et en agility [4].

Aujourd’hui la grille 4A a été mise à disposition sur le site Zoopsy [5] et chaque vétérinaire peut la télécharger pour l’utiliser dans sa pratique quotidienne.

Bibliographie

  1. Grangé, E., La grille 4A permet-elle l'évaluation du comportement chez le chiot ?, in Diplôme Universitaire de psychiatrie vétérinaire. 2020, UCBL 1.
  2. Guitaut, N., Ingestion de Corps Étrangers et troubles du comportement : Réalisation d'une grille 4A au sein d'une population de chiens adultes ayant subi une intervention pour extraire un corps étranger digestif. 2016, UCBL1: Lyon.
  3. Creissel, A., La grille 4A permet-elle de suivre l'évolution comportementale et émotionnelle des chiens utilisés en médiation animale au cours de leur carrière ? 2020.
  4. Buysse, M., Utilisation de la grille 4A : peut-on mettre en évidence une différence concernant la fréquence des troubles du comportement entre les chiens pratiquant l'agility en grade 2 et en grade 3 ?, in Diplôme Universitaire de psychiatrie vétérinaire 2020.
  5. Beata, C. Grille 4A. 2018; Available from: https://www.zoopsy.com/grille-4a.php
Pas de conflit d'intérêt déclaré.

> Comportement du chaton : cohabitation, organisation du territoire, appartement ou jardin 

Muriel MARION
GECAF
Marseille France

I- Introduction 

Au moment de l’accueil de leur nouveau chaton, les propriétaires sont avides de renseignements, même s’il ne s’agit pas de leur premier chat. Il est important de pouvoir répondre à leurs questions sans pour autant les noyer d’informations. Pour répondre le plus judicieusement possible, il va vous falloir commencer par répondre à leurs questions par des questions en retour. Parfois fins connaisseurs de l’espèce, parfois pleins de croyances et de fausses idées reçues , à vous de les aider à trier.

II- Appartement ou maison ? Accès à l’extérieur ou pas ?

1. Différentiel de milieu de vie

Plus les conditions de vie futures du chaton seront proches du milieu de vie dans lequel il s’est développé les premières semaines, plus son adaptation sera facile et harmonieuse. Par exemple un chaton né en maison avec de jeunes enfants et d’autres espèces animales, adopté par des nouveaux propriétaires en maison, avec des enfants et des animaux, a toutes les chances de se sentir très vite à l’aise. Réaliser cette adéquation n’est pas toujours possible. Les nouveaux adoptants ne connaissent pas forcément les conditions de vie précoce de leur chaton (adopté via des petites annonces, livré sur un parking, trouvé dans la rue, adopté en APA…) et le plus souvent quand ils arrivent dans la structure vétérinaire l’adoption est déjà faite. Avoir ces données, si l’adoption est déjà effective permet de créer pour le chaton un univers le plus proche possible de ce qu’il a connu afin de faciliter son adaptation. S’il évoluait dans un univers très bruyant, très stimulant, il faudra veiller à lui fournir des stimulations par le jeu, des petits parcours à découvrir, de quoi nourrir sa curiosité. Si à l’inverse il a été trouvé caché sous un buisson au fond d’une impasse très calme, il faudra lui aménager une zone de repos au calme et le stimuler progressivement sans jamais aller au-delà de ce qui l’effraie.

2. Âge d’adoption

Plus le chaton sera jeune, tout en respectant l’âge légal de 8 semaines, plus il sera facile de réaliser une adaptation à son nouveau lieu de vie. Si le chat est déjà âgé de plus de 4 mois et qu’il a eu l’habitude de sortir, il peut être difficile de le cantonner à l’intérieur. Si un accès extérieur n’est pas possible, il faut veiller à ce que les activités proposées à l’intérieur lui permettent d’avoir un niveau d’activité équivalent.

3. Taille de l’habitation

Si le logement est grand, il faudra le cantonner au départ dans une ou deux pièces et augmenter progressivement la surface disponible , si l’objectif est qu’il aille ensuite partout. Si un accès à l’extérieur est possible et souhaité, commencer par le laisser quelques jours à l’intérieur afin qu’il dépose des marques faciales, avant de lui proposer des sorties. D’abord sous surveillance (pas nécessairement attaché) puis seul après avoir vérifié qu’il puisse facilement rentrer ou trouver un refuge sûr en cas de besoin.

4. Organiser le coin repas et le rythme d’alimentation

Le chat adulte préfère souvent manger en hauteur, dans le cas du chaton la facilité d’accès doit être priorisée. S’il n’y a pas d’autres animaux présents, les gamelles ou distributeurs peuvent être installés au sol. Le chat doit avoir un accès permanent à son bol alimentaire. Le libre service permet d’apprendre plus facilement au chaton à se réguler, le fractionnement des repas est souvent propice à la mise en place de rituels de distributions qui pourront devenir des sources de mauvaise gestion des quantités ingérées. L’attente et l’excitation avant la distribution, en particulier si elles sont trop peu fréquentes, peut générer des conduites agressives. Il faut apprendre au maître à développer des interactions positives de jeux sans relation avec l’aliment et évoquer le fait que le chaton peut les solliciter par besoin de contact et de relation et pas uniquement pour réclamer de la nourriture.

5. Créer dès le départ les meilleures conditions pour éviter les malpropretés

À l’âge de l’acquisition, la propreté est souvent sans souci, à condition que l’accès au coin propreté ne soit pas un parcours du combattant, que la hauteur du bac, la quantité de litière soit adaptée à un individu de petite taille et que l’entretien soit régulier. Dès le plus jeune âge, les chatons sont exigeants sur la qualité de leur lieu d’élimination. Ils préfèrent une caisse propre à une caisse parfumée, les déodorants ne masquent les mauvaises odeurs que pour un nez d’humain. Si l’appartement ou la maison est grand, il peut être nécessaire au début au moins de disposer deux ou trois litières. Il ne faut pas punir la malpropreté (même sur le fait) mais favoriser la propreté et féliciter. Les punitions par mise sur la litière et maintien forcé sont de bons pourvoyeurs de malpropreté par aversion acquise de la litière.

III- Les relations

1. Avec les humains adultes

Il arrive dans un nouveau milieu avec de nouvelles personnes, il est important de le laisser explorer à son rythme ce qui l’entoure, y compris les humains. Ce n’est pas parce qu’il s’approche et renifle qu’il souhaite être soulevé et pris au bras. De petites séances de jeux avec une ficelle ou une canne à pêche sont souvent l’occasion de nouer des contacts positifs. Ce jeu, ne doit jamais basculer dans l’excitation et conduire le chaton à blesser involontairement.

2. Avec les jeunes enfants

Le comportement des enfants doit être surveillé. Le chaton doit le plus souvent avoir les pattes posées au sol et pouvoir prendre des distances quand il veut. Les enfants peuvent porter le chat mais ils doivent plutôt le caresser en le laissant libre. Des manipulations maladroites peuvent rendre le chat brutal et distant, même si ces défauts ne s'expriment pas immédiatement.

3. Avec un autre chat

Si la famille possède déjà un ou plusieurs chats adultes parfaitement adaptables, le «laisser faire» sera le conseil le plus pertinent à donner. Des menaces pourront exister dans un premier temps à l’égard du chaton. Elles lui permettront d’apprendre la distance à laquelle il est toléré dans tel ou tel endroit. Le chat résident pourra ainsi accepter que le chaton vienne se blottir contre lui dans certains lieux dédiés à l’observation et complètement refuser l’approche de ce dernier dans des lieux correspondant pour lui à des champs d’isolement. Ces distances peuvent varier également au cours du temps mais il est important de laisser la possibilité au chaton d’apprendre en n’intervenant pas lorsqu’il fait l’objet de menaces.Si de précédents essais d’adoption ou de présentation à d’autres animaux se sont déjà soldés par un échec, il peut être prudent de conseiller aux propriétaires de consulter avec le chat résident afin de favoriser la cohabitation et l’acceptation du nouveau venu.

4. Avec les autres animaux

Le chaton est souvent craintif du chien. Cette crainte est parfois justifiée et pour qu'une habituation s'installe il faut lui fournir des possibilités de se réfugier en hauteur. Ce n'est pas dans les bras qu'il doit trouver protection car cela risque d'augmenter le comportement de rejet du chien. La gamelle du chien doit être vide et la gamelle du chaton doit être placée à l’abri du chien, de préférence en hauteur.Ces conseils sont applicables avec un chien dont le comportement est dans la norme. Si le chien présente une maladie du comportement, sa prise en charge est nécessaire avant l’arrivée du chaton. Si le chien présente une absence complète de socialisation au chat, il faut renoncer à l’adoption d’un chaton car une prédation de la part du chien est possible.

IV- L’éducation du chaton

1. Les apprentissages

Le chaton va progressivement explorer son nouveau territoire et dédier des zones à certaines activités. La stabilité du lieu de vie est un élément important du bien-être comportemental d’un chat.

Dès le plus jeune âge le chaton peut aller dans le jardin.  A cet âge la crainte de se trouver seul dans un grand univers inconnu permet au propriétaire de fixer le rappel. Dès que le chaton commence à miauler, l'appeler pour lui apprendre que revenir à l'appel est une solution salvatrice et rassurante. L'apprentissage se fixe alors durablement.

2. Les interdits

Pour "éduquer le chat" le mieux est de répéter les refus. S’il monte sur la table, ils doivent  le reposer au sol, sans le taper, sans lui faire peur. Il apprendra progressivement à respecter cette zone et n'y reviendra plus. Il faut juste qu’ils soient cohérents : lui donner de temps en temps un petit morceau de ce qu’ils mangent, c'est juste lui apprendre l'inverse.

Si leur chaton fait des bêtises, par exemple il gratte dans les plantes ou fait ses griffes sur le fauteuil, une sanction peut être traduite par « ok, je ne fais plus cela en leur présence, mais je continuerai quand ils ne sont pas là »Il sera plus efficace de réorienter le comportement gênant vers un comportement accepté ou souhaité, par exemple en disposant à proximité un griffoir qui sera progressivement déplacé par la suite si l’emplacement n’est pas idéal.

V- Conclusion

Vos clients ont besoin d’être guidés. A une époque où l’information diffuse facilement, les conseils des professionnels sont encore plus important car les futurs propriétaires sont noyés d’informations qui leur disent tout et son contraire. Les influenceurs ne sont pas des « spécialistes » de la santé et du bien-être du chat, vous si.

Pas de conflit d'intérêt déclaré.

> Comportement du chiot : apprentissage de la propreté et organisation dans la maison

Sylvia MASSON
Clinique De La Tivollière
Voreppe France

I- Introduction

Pour le vétérinaire, la discussion autour de l'acquisition de la propreté est l’occasion de vérifier que le chiot progresse comme attendu, mais aussi d’aborder le sujet des méthodes d’éducation utilisées et de prodiguer des conseils sur les éléments de base à mettre en place à la maison.

II- Apprentissage de la propreté

L’apprentissage de la propreté implique de sortir le chien autant que possible. Idéalement, il convient de le sortir toutes les heures ou deux, aux moments où il sera le plus susceptible de faire ses besoins. Cela correspond le plus souvent à son réveil, à l'issue des repas et après avoir joué.

Une fois dehors, et avant de jouer ou de partir en promenade avec le chien pour limiter les distractions, il faut laisser le chien renifler le sol et attendre patiemment, et sans interagir avec lui, qu’il élimine. Lorsque le chien s’exécute, il faut veiller à le laisser terminer avant de le féliciter et le récompenser. Par ailleurs, il ne faut pas rentrer le chien immédiatement après qu’il a fait ses besoins pour éviter qu’il n’associe l’élimination à la fin de la sortie.

Si le chien fait ses besoins à l’intérieur de la maison, la stratégie à adopter dépend du moment de découverte de l’incident.

Si l’on voit faire le chien, une procédure de contre-conditionnement doit être mise en place en interrompant l’élimination par disruption ou guidance verbale (« non ») et en amenant le chien le plus vite possible où il est censé éliminer. S’il termine de faire ses besoins à cet endroit, il doit être félicité.

Si l’on ne voit pas faire le chien, la seule chose à faire est de nettoyer le lieu d’élimination en évitant les produits à base d’ammonium quaternaires ou la javel, qui incitent le chien à refaire ses besoins à cet endroit. Notons que, s’il est possible de conseiller aux propriétaires de ne pas procéder au nettoyage devant leur chien, c’est surtout pour éviter que le chien marche dans les déjections pendant le nettoyage. De la même manière que le chien ne peut associer le moment où il élimine avec la punition a posteriori, il ne peut pas non plus associer la position accroupie au jeu au point de faire ses besoins exprès pour jouer deux heures après.  Il peut avoir envie de jouer à la vue de la simple position de jeu, mais le lien entre les deux évènements est peu probable.

Par ailleurs, dans les deux cas, les punitions sont à proscrire car elles nuisent à l’apprentissage du chien. Celui-ci risque de comprendre qu’il ne doit pas faire ses besoins du tout, ou pas devant son propriétaire, ou en faire disparaître les traces en léchant son urine ou mangeant ses excréments.

La procédure d’apprentissage de la propreté doit être répétée en augmentant progressivement l’intervalle entre les sorties. L’objectif est qu’elle soit parfaitement acquise à 5 mois. La plupart des chiots sont déjà propres à 3 ou 4 mois. Un retard d’acquisition de la propreté doit donc faire l’objet d’une prise en charge comportementale, car il témoigne souvent de l’existence d’une dérégulation de l’axe des autocontrôles ou de celui de la peur chez le chien : lorsqu’il explore de manière désordonnée différents lieux d’élimination et les abandonne à chaque fois avant d’avoir fait ses besoins parce qu’il a été distrait par quelques stimuli olfactifs, auditifs ou visuels, le chien risque de se soulager dans la maison dans laquelle les distractions sont moins nombreuses. Dans le cas de la peur, certains chiens sont trop apeurés quand ils sont dehors pour oser éliminer et ils ne feront qu’une fois rentrés de promenade.

De même, une détérioration de la propreté est un motif de prise en charge comportementale lorsqu’elle ne peut être expliquée par une maladie organique, puisqu’elle peut être le signe d’un trouble cognitif ou émotionnel.

III- Organisation du lieu de couchage et alimentation

Les tapis, paniers ou coussins qui servent de lieux de couchage au chien doivent être confortables et suffisamment grands pour qu’il puisse s’y étendre de tout son long.

La cage, qui doit être assez grande pour que le chien puisse s’y tenir debout et se retourner dedans, n’est pas un accessoire qui doit être utilisé de manière systématique ou prolongée. Cependant, elle peut être utile ponctuellement et sur des durées très courtes pour offrir un lieu de refuge apaisant au chien, assurer sa sécurité ou celles des autres. Elle permet enfin de mettre en place différents apprentissages comme celui de la solitude, de la propreté ou des trajets en voiture.

Idéalement, le chien doit avoir un lieu de couchage par zone de vie qui doit être respecté par les humains pour éviter que le chien ne les agresse parce qu’ils le dérangent dans son refuge, mais le chien doit aussi être capable de s’y rendre sur demande de ses propriétaires en apprenant le « à ta place ».

A l’inverse, les propriétaires du chien peuvent, s’ils le souhaitent, lui interdire l’accès à certaines pièces de la maison, au canapé ou au lit. Cela aide le chiot à apprendre à respecter certaines règles de vie ou à acquérir l’autonomie.

Le chien doit pouvoir patienter avant ses repas, mais en retour ne doit pas être dérangé pendant qu’il mange. En effet, l’idée selon laquelle mettre les mains dans la gamelle du chien ou la lui retirer ponctuellement pendant son repas permet d’éviter qu’il n’agresse quelqu’un qui approcherait ou manipulerait sa gamelle est non seulement fausse mais dangereuse. Ces interventions sont anxiogènes pour le chien et augmentent au contraire le risque qu’il ne se mette à défendre sa nourriture.

D’un côté, faire ce type de manœuvre sur le chien ne l’empêche pas d’agresser une autre personne, notamment quelqu’un ayant un statut différent comme un visiteur. D’un autre côté, certains chiots menacent à plusieurs mètres quiconque approche de leur gamelle, sans pour autant avoir un historique avec tentatives de vol dans leur gamelle.  Ce symptôme est anormal pour un chiot s’il se produit plus d’une fois après adoption. Il doit faire l’objet d’une investigation comportementale urgente.

Une fois qu’il a été autorisé à accéder à sa gamelle, le chien doit être laissé tranquille, quitte à l’isoler, pendant toute la durée de son repas. Après une vingtaine de minutes, la gamelle, qu'elle soit vide non, doit être retirée jusqu'au prochain repas.

A l’inverse, lorsque ses propriétaires mangent, le chien doit respecter ce temps de repas en se tenant à distance de la table, même s’il peut obtenir des restes du repas de ses propriétaires lorsque celui-ci sera terminé. Dans le cas où le chien n’est pas motivé par la nourriture et reste immobile près de la famille pendant le repas mais sans jamais déranger, il n’y a pas lieu de faire appliquer cette règle à tout prix.

Notons que la gamelle anti-glouton permet de ralentir la vitesse d’ingestion du chien lorsqu’elle est excessive, mais ne résout jamais le problème de l’absence de satiété alimentaire.

IV- Exploration, jouets et accessoires

Les jouets proposés au chien doivent être solides pour limiter les destructions qui peuvent conduire à des ingestions de corps étranger et des occlusions surtout chez les chiens présentant des états impulsifs (Masson et al., 2021). Ils peuvent être de différents types.

Les jouets d’occupation ou de mastication sont des jouets creux qui peuvent être fourrés  de manière à ce que le chien puisse s’occuper seul avec. Ils ne doivent pas être donnés dans le but de masquer des destructions ou parce que le chiot n’arrive pas à contenir son excitation et semble avoir un besoin infini de mastiquer. Ce symptôme doit faire l’objet d’une investigation comportementale, surtout si l’exploration orale persiste pendant la période pubertaire.

Pour jouer, le chien doit apprendre à respecter des règles, quel que soit le jeu. Il doit donc gérer son excitation dans ce contexte et accepter la fin de cette activité. Pour cet apprentissage du contrôle de l’excitation et de la gestion de la frustration, il est possible de lui apprendre un ordre comme « c’est fini » qui signe la fin d’une activité et le retour au calme. 

Les accessoires utilisés pour promener le chien doivent être choisis judicieusement afin d’assurer le confort et la sécurité de tous, surtout si le chien est sujet à une excitation excessive ou à de la peur. Le chien doit être progressivement habitué à ces accessoires, jusqu’à pouvoir lui mettre sans qu’il essaye de reculer ou de se défendre. Lorsqu’il les porte, il ne doit pas éprouver d’inconfort.

Le collier doit être confortable pour le chien. Les colliers étrangleurs ou à pointes sont à proscrire (Ziv, 2017). Le collier doit être aussi bien ajusté, c’est-à-dire qu’il faut pouvoir passer deux doigts entre le collier et la peau du chien. Il doit être solide : le chien ne doit pas pouvoir s’en dégager en cas d’excitation ou de peur intense afin de ne pas mettre lui-même ou les autres en danger. 

Il est important de vérifier que les propriétaires savent comment réprimander le chiot, puis se réconcilier lorsqu’ils souhaitent signifier qu’ils ne valident pas le comportement qu’il vient de produire. En effet, les méthodes coercitives sont anxiogènes, augmentent le risque d’agressivité et sont à proscrire(Herron et al., 2009; Masson et al., 2018).

Le harnais est une excellente alternative au collier pour les chiens qui tirent en laisse, à condition bien évidemment de choisir un harnais anti-traction de type Animalin® ou en Y, dont l’attache anti-traction est devant, ou un harnais de type Halti® dont l’attache est au niveau du dos, plutôt qu’un harnais de traction.

La laisse doit être suffisamment légère pour ne pas peser sur le cou du chien. Celles en métal sont donc à éviter. Elle doit mesurer de 1m50 à 2 m maximum pour les promenades en milieu urbain. Si c’est une laisse « lasso », c’est-à-dire une laisse qui comporte une boucle servant de collier au chien, il faut veiller à ce que le modèle possède un système empêchant l’étranglement du chien.

Par ailleurs, l’utilisation d’une longe, d’une longueur pouvant aller jusqu’à plusieurs dizaines de mètres, est une mesure de sécurité indispensable pour les promenades en milieu rural lorsque le chien est en cours d’apprentissage du rappel, ou susceptible de s’enfuir ou d’interagir de manière inadaptée avec les promeneurs, les véhicules ou les autres animaux.

Le rappel est parfois laissé de côté par des propriétaires qui ne souhaitent pas ou n’osent pas lâcher leur chien. Cela est souvent dû à son comportement, mais aussi à leur peur d’un accident ou d’une fugue. Il est important de leur rappeler que cet ordre permet aussi de pouvoir faire rentrer ou sortir le chien de la maison ou de le faire venir pour l’attacher ou le soigner, et constitue également une mesure de sécurité précieuse si le chien parvenait à se défaire de sa laisse. Le rappel reste pour tous un exercice quasi indispensable pour la vie quotidienne. 

Bibliographie

  1. Herron, M.E., Shofer, F.S., Reisner, I.R., 2009. Survey of the use and outcome of confrontational and non-confrontational training methods in client-owned dogs showing undesired behaviors. Applied Animal Behaviour Science 117, 47–54. https://doi.org/10.1016/j.applanim.2008.12.011
  2. Masson, S., Guitaut, N., Medam, T., Béata, C., 2021. Link between Foreign Body Ingestion and Behavioural Disorder in Dogs. Journal of Veterinary Behavior. https://doi.org/10.1016/j.jveb.2021.04.001
  3. Masson, S., Vega, S., Gazzano, A., Mariti, C., Pereira, G., Halsberghe, C., Leyvraz, A., Mcpeake, K., Schoening, B., 2018. Electronic training devices: discussion on the pros and cons of their use in dogs as a basis for the position statement of the European Society of Veterinary Clinical Ethology (ESVCE). Journal of Veterinary Behavior 25. https://doi.org/10.1016/j.jveb.2018.02.006
  4. Ziv, G., 2017. The effects of using aversive training methods in dogs—A review. Journal of Veterinary Behavior: Clinical Applications and Research 19, 50–60. https://doi.org/10.1016/j.jveb.2017.02.004
Pas de conflit d'intérêt déclaré.

> Comportement du chiot : mordillements, destructions et exploration orale

Sylvia MASSON
Clinique De La Tivollière
Voreppe France

La balance activation/inhibition

Les autocontrôles sont constitués par l'ensemble des processus impliqués dans la capacité à contrôler ses propres comportements et ses émotions. Ils résultent de l’équilibre entre les processus d’activation et d'inhibition.

La motivation comportementale, capable de déclencher un comportement adapté, se met en place à l'intérieur des bornes fixées par le développement précoce. Les expériences positives permettent l'orientation de l'action à travers les récompenses reçues, qui viennent renforcer l’intensité et orienter la direction de la motivation.

L’inhibition comportementale est un processus indispensable à la régulation des comportements et des émotions. Elle permet de produire activement la phase d’arrêt qui termine toute séquence comportementale : sans ce mécanisme, le comportement continuerait en boucle. De fait, toute production comportementale est contrebalancée par une inhibition comportementale. Notre cerveau maintient un rapport activation/inhibition constant dans les circuits cérébraux (Xue et al., 2014).

Les autocontrôles sont le résultat de cette balance activation/inhibition et représentent la capacité d’un individu à se contrôler spontanément, quand il est livré à lui-même. Ils s’acquièrent via des interactions avec les adultes, notamment la mère, qui va sanctionner les morsures non contrôlées, les jeux trop violents ou tout simplement une excitation excessive. Il ne s’agit pas ici de hiérarchie ou de dominance, mais d’apprentissage du contrôle des émotions, de la motricité et donc de l’impulsivité.

Période de socialisation

Dès la période de socialisation, la mère différencie ses chiots et ses interactions avec chacun sont uniques. L’inhibition est apprise via des actions de blocage maternel qui immobilisent le chiot et cessent dès qu’il y a décontraction. Si le chiot se relève immédiatement, il est de nouveau plaqué, jusqu’à ce qu’il arrive à se détendre pendant plusieurs secondes. Cette méthode de contrôle externe permet au chiot d’expérimenter le retour au calme et l'apaisement qui en résulte. Après quelques essais, le chiot apprend à se contrôler seul, avec une intervention de plus en plus discrète de la part de sa mère. Il acquiert du contrôle interne, qu’il pourra reproduire spontanément dans des contextes analogues, sans intervention extérieure.

Ces manipulations effectuées par les adultes sur les chiots permettent d’apprendre progressivement l’inhibition de la morsure, c’est-à-dire la capacité à contrôler la force de sa mâchoire, l’inhibition locomotrice, c’est-à-dire la capacité à contrôler ses mouvements de façon à ne pas blesser les partenaires lors des interactions.

C’est en grandissant que le chiot acquiert progressivement et jusqu’à la fin de la puberté des capacités d’inhibition croissante de son cortex préfrontal ventromédial (CPFvm). Grâce à cela, il va pouvoir contrôler sa locomotion et ne plus faire de gestes brusques, mais également maîtriser ses émotions afin de tolérer la frustration, contenir ses excès de joie et d’excitation.

Contrôle de la morsure

En ce qui concerne le contrôle de sa morsure, il apprend d’abord à relâcher en réponse aux cris aigus de ses frères et sœurs et à l’intervention active de sa mère. Cette capacité doit être acquise en fin de période de socialisation, même si, à ce stade, le chiot va reprendre le mordillement rapidement après une interruption brève. L’important est qu’il s’arrête dès qu’un stimulus disruptif est émis. Ensuite, il affine ce niveau de contrôle pendant la période juvénile à la fin de laquelle les prises en gueule doivent être complètement indolores, même lorsqu’elles se produisent dans des situations de forte excitation. Pour y parvenir, le propriétaire doit interrompre de plus en plus tôt le mordillement et ce, sur des mordillements de moins en moins intenses. Progressivement l’envie de prendre en gueule est transformée en exploration olfactive et ces prises en gueule sont exceptionnelles dès la période pubertaire.

Ainsi le contrôle de la morsure s’apprend en deux temps : capacité d’interruption puis contrôle de l’intensité.

A l’âge d’adoption habituel, aux environ de 8 semaines, le chiot explore encore son environnement avec la gueule. Il commence à acquérir le contrôle de sa mâchoire : les mordillements ne doivent plus blesser et une réaction de douleur (cri aigu) de la part de l’autre partie doit les faire cesser. Pour beaucoup de chiots, ce phénomène est incomplet à cet âge du fait de vulnérabilités ou de conditions de développement non optimales. Les comportements de mordillements doivent se calmer dès les premiers gémissements du partenaire de jeu. En redirigeant l'activité buccale vers des objets pendant le jeu et en utilisant des punitions négatives (retrait du contact social), il est normalement possible d’obtenir un rapide niveau de contrôle à 3 mois, à la fin de la période de socialisation.

Troubles comportementaux

En fin de période de socialisation, le chiot peut être remuant, joueur et parfois mordiller, mais il dort beaucoup, bien au-delà de douze heures par jour. Il a tendance à explorer l’environnement avec sa gueule (exploration orale), mais, s’il est bien équilibré, il détruit peu et n’avale pas d’éléments non comestibles. Un chiot de 12 semaines qui mordille, qui fait mal et qui ne s’arrête pas lorsqu’il entend un bruit strident, qui commet des destructions importantes, qui ingère des éléments non comestibles et qui dort peu doit faire l’objet d’une attention particulière : son comportement n’est pas normal. Il est très évocateur d’un état impulsif ou compulsif et d’un syndrome HSHA.

Pendant la phase juvénile, le chiot passe progressivement de l’exploration orale à l’exploration olfactive, qui doit être le seul type d’exploration à l’entrée de la puberté. Le chiot peut encore saisir avec sa gueule, mais a beaucoup plus tendance à sentir l’objet ou le partenaire social. Ses contacts sociaux dans les moments d’excitation peuvent se traduire par des prises en gueule ouverte, c’est-à-dire très contrôlées. Il prend en gueule délicatement et ne fait jamais mal.

Certains chiots montrent des difficultés de concentration et passent d’un stimulus à l’autre, ne terminent pas leur séquence comportementale, notamment exploratoire, avant d’en démarrer une autre et de ce fait apprennent mal. L'absence de phase de retour à l'équilibre dans leur séquence comportementale interdit la mise en place des associations action-récompense de l’action. Le parfait exemple est le retard à la propreté où, après avoir exploré puis abandonné de nombreux lieux d’élimination, le chiot se met en position mais ne termine pas sa séquence car il est attiré par un nouveau stimulus olfactif ou visuel. Après une heure de promenade infructueuse, le chiot se soulage dans la maison ou les stimuli sont moins nombreux et plus habituels. Rappelons que la propreté doit être parfaitement acquise à l’âge de 5-6 mois chez le chiot normal.

La phase pubertaire peut voir s’aggraver les troubles comportementaux des chiens lorsqu’ils présentent une acquisition des autocontrôles incomplète. C’est à cet âge que des agressions peuvent apparaître. Ces agressions sont motivées le plus souvent par de la frustration ou de la douleur. En effet, face à un chiot qui grandit en taille et en force et qui se contrôle mal, les propriétaires ont tendance à utiliser de plus en plus d’outils ou de méthodes d’éducation coercitifs. Le chien peut alors réagir agressivement, ce qui entraîne le plus souvent une escalade symétrique, qui va inexorablement aggraver l’état du chien et dégrader sa relation avec la famille. Cette dégradation de la relation est le premier motif d’abandon ou d’euthanasie. Les méthodes coercitives augmentent la probabilité d’apparition d’agressions et d’états anxieux (Masson et al., 2018).

Si le chien entre en période adulte avec de bons autocontrôles, ils resteront stables jusqu’à la phase de sénescence. S’ils sont incomplets, ils viendront imprégner tous les comportements du chien qui réagit trop vite ou trop fort dans certaines situations. Par exemple, exposé à un stimulus phobogène, le chien peut plus rapidement développer des phobies dont l’expression peut être très productive, avec aboiements et destructions. Ces chiens peuvent aussi rapidement basculer dans l’agression dans certaines situations de frustration, comme la contention au cours d’un soin ou l’enfermement dans un espace réduit.

La période de sénescence n’est pas censée concerner l’axe des autocontrôles. Pour certains chiens, cependant, un vieillissement pathologique va venir les déréguler, entraînant une reprise de comportements impulsifs et une perte du signal d’arrêt dans certains comportements. Ces dérèglements ne sont pas faciles à distinguer des troubles cognitifs, qui peuvent eux aussi se traduire par des pertes d’apprentissage comme l’apparition de malpropreté, l’ingestion de corps étrangers ou l'apparition de crises d’agitation motrice (Masson et al., 2023). 

Bibliographie

  1. Masson, S., Bleuer-Elsner, S., Muller, G., Medam, T., Chevallier, J., Gaultier, E., 2023. Psychiatrie vétérinaire du chien, No Ledge Editions. ed. No Ledge Editions.
  2. Masson, S., Nigron, I., Gaultier, E., 2018. Questionnaire Survey on The Use Of Different E-Collar Types in France in Everyday Life With A View To Providing Recommendations for Possible Future Regulations. Journal of Veterinary Behavior 26. https://doi.org/10.1016/j.jveb.2018.05.004
  3. Xue, M., Atallah, B.V., Scanziani, M., 2014. Equalizing excitation–inhibition ratios across visual cortical neurons. Nature 511, 596–600. https://doi.org/10.1038/nature13321
Pas de conflit d'intérêt déclaré.

> Répondre aux questions sur le comportement du chaton : Malpropreté

Muriel MARION
GECAF
Marseille France

I- Introduction

L’acquisition de la propreté est généralement facile chez les chatons. Lorsqu’elle présente un retard les propriétaires s’alertent rapidement et ils ont raison. Elle peut être la conséquence d’une affection organique, d’un défaut d’apprentissage ou d’une maladie comportementale mais en aucun cas il s’agit d’un comportement normal.

II- Vérifier l’absence de maladie organique : malformations, affections urinaires, trouble neurologique

S’il existe des urgences à déféquer ou à uriner, l’apprentissage de la propreté peut être compromis. Avant d’entamer une enquête sémiologique comportementale, un examen clinique s’impose ainsi qu’une observation des urines et des selles ou au moins un descriptif précis. En cas de doute des examens complémentaires peuvent être prescris. L’examen clinique doit comprendre un examen neurologique en particulier lors d’énurésie ou d’encoprésie. Un retard d’acquisition de la propreté est toujours, en l’absence de lésion organique, un élément important à prendre en compte. Il peut s’agir d’un symptôme accompagnant un retard mental (chaton ayant subi une carence protéique sévère dans les premières semaines du développement) mais également d’un symptôme rencontré lors de trouble du développement (syndrome de privation sensorielle ou HsHa).

III- Vérifier la qualité du coin propreté

Les chats dès leur plus jeune âge sont très sensibles aux qualités organoleptiques de leur coin toilette.Des questions à propos de sa localisation et de sa fréquence de nettoyage seront nécessaires.

1. Facilité d’accès

La bonne volonté du chaton à éliminer au bon endroit peut être compromise par un accès compliqué à ses toilettes. La caisse sur la terrasse pourquoi pas mais il faut veiller à ce que la terrasse soit accessible de jour comme de nuit quel que soit la température extérieure. Si le chaton est très petit il faut prévoir un bac à litière avec une entrée basse afin qu’il soit facile pour lui d’enjamber le rebord. La quantité de litière doit être adaptée à ses petites pattes quitte au départ à renouveler la litière plus souvent, il ne doit pas se retrouver enterré quand il s’y rend.

2. Entretien

La fréquence d’élimination est importante chez le chaton et la fréquence de nettoyage peut être insuffisante.Si la caisse ne lui convient plus, le chaton va rechercher un autre support pour se soulager. Une surface horizontale, plane, tranquille, meuble et absorbante sera pour lui parfaite (tapis, couettes, coussin, bac à fleurs). La qualité des litières est très variable. Certaines sont peu absorbantes des liquides et des odeurs, certaines blessent ou collent aux pattes. Les propriétaires n’ont pas toujours conscience qu’une litière de marque distributeur à bas coût peut-être de qualité insuffisante.

III- Quel apprentissage a été mis en place

1. Création d’une aversion acquise de la litière

Des propriétaires peuvent avoir eu la mauvaise idée de maintenir le chaton de force, ou de le remettre sans cesse dans la litière en attendant qu’il y fasse une première fois. cette attitude peut créer une aversion acquise de ce bac là et/ou de ce support là. Il faudra au moins changer le bac, parfois le type de litière et l’emplacement du bac, en plus d’un nettoyage approprié des surfaces souillées.

2. Apprentissage à ne pas faire devant eux

Si les propriétaires crient et interviennent à chaque fois qu’ils voient le chaton « faire » là où il ne faut pas mais que le « pas là » n’est jamais assorti de l’accompagnement à la litière ou de récompenses quand il fait dans la litière, il risque d’apprendre qu’il ne faut pas faire en leur présence ou devant eux mais toujours pas où il est souhaitable qu’il fasse.

3. Apprentissage de la mère

Il a pu apprendre avec sa mère par imitation à éliminer dans un jardin. Le support appris est alors la terre et non une litière commerciale dans un bac. Il faudra dans un premier temps remplacer la litière choisie par de la terre, puis quand le bac aura été accepté et reconnu comme le lieu d’élimination, petit à petit mêler de la litière à la terre pour à terme avoir complètement remplacé la terre par de la litière.

4. Vérifier l’intégrité de la séquence d’élimination

Le comportement éliminatoire se décompose classiquement en trois phases :

  • une phase appétitive : le chat repère la zone d’élimination par une reconnaissance visuelle et olfactive. Il fait alors un petit trou avec ses pattes antérieures ;
  • une phase consommatoire : pendant cette phase le chat s’installe en position accroupie, queue dressée, les orifices urogénitaux en regard du trou préalablement creusé. Une miction ou une défécation a alors lieu. Lors d’élimination urinaire le volume d’urine est en général important;
  • une phase d’apaisement : après avoir reniflé la zone où il a éliminé, il recouvre avec les antérieurs la zone souillé.

L’acquisition de la propreté est très rapide chez le chaton et peut être obtenue dès l’âge de trois à quatre semaines. Quand il est avec sa mère il la suit et apprend ainsi à reconnaître l’aire destinée à ce comportement. Dès qu’il a repéré la zone dédiée à cette activité, pour peu que l’accès lui en soit facile, il retourne éliminer au même endroit. La séquence d’élimination est complète à l’âge de sept semaines.

IV- Vérifier d’autres points du comportement du chaton

Si tous les points précédents ont été vérifiés, Absence de maladies ou de malformations organiques, coin propreté conforme, pas d’erreur de communication dans l’apprentissage, il convient de vérifier si d’autres comportements ne sont pas dans la norme. Les propriétaires peuvent avoir été alertés par la malpropreté parce que c’est le point qui les dérange le plus sans que pour autant l’ensemble des comportements de leur chaton soit sans problème.

1. Vérifier l’absence de retard à l’acquisition de la morsure et de la griffure inhibée

A deux mois, un chaton sait jouer sans faire mal. Les bras, mains et pieds des propriétaires ne doivent pas trahir la présence d’un chaton chez eux.

2. Vérifier le temps et la qualité de sommeil

Passé la troisième semaine, les phases de sommeil du chaton ressemblent à celles de l’adulte. Les premières semaines le chaton dort environ 95 % de son temps, ce pourcentage diminue avec l’augmentation du temps de jeu pour atteindre en moyenne 50 % de son temps à l’âge adulte. Lors des phases d’éveil, du jeu et de la curiosité doivent exister. Moins de sommeil doit alerter, plus aussi.S’il existe une diminution globale du temps de sommeil de 30% un syndrome Hsha doit être recherché, si le chaton semble dormir en permanence ou présente régulièrement des réveils en sursaut, l’existence d’un état dépressif ou anxieux inhibé doit être exploré.

3. Vérifier l’existence d’un signal d’arrêt dans :

  • la prise alimentaire : la satiété doit être présente et le chaton doit être capable de stopper la prise alimentaire même s’il reste de la nourriture dans la gamelle;
  • la prise de boisson : de la même façon un chaton doit être capable d’arrêter sa prise de boisson avant de vider complètement la gamelle d’eau;
  • le jeu : même très motivé par le jeu, le chaton doit être capable de s’arrêter de jouer après un certain temps.;
  • l’activité motrice : certain chatons sont très agités, en mouvement presque tout le temps. L’activité motrice est trop importante, maladroite et déstructurée. Ce sont des chatons qui se mettent volontiers en danger, ils sont très maladroits et peuvent se blesser en tombant et en évaluant mal les distances.

L’absence de signal d’arrêt doit faire suspecter un syndrome Hsha. Lors de syndrome Hsha le chaton a du mal à organiser ses apprentissages car il est sans cesse en train d’entamer une nouvelle séquence comportementale . L’apprentissage de la propreté est dans ce cas souvent ralenti.

4. Vérifier l’existence et la qualité des marquages

Lorsque les chatons sont laissés au contact de leur mère, le marquage territorial apparaît progressivement, parallèlement à son autonomisation. Ils commencent à frotter sa tête sur les saillies des meubles à partir de 5 à 6 semaines.Lors d’adoption par une famille humaine, l’apparition du marquage territorial est variable mais lorsqu’il existe il doit être organisé. Il est possible de rencontrer des chatons qui effectuent beaucoup de marquage territorial lors de syndrome HsHa, qui s’accompagne d’un marquage souvent déstructuré. Les marques déposées sont peu efficaces dans l’apaisement du territoire. De plus lors de syndrome HsHa le chat a du mal à arrêter une séquence comportementale entamée, par défaut du signal d’arrêt et a tendance à répéter en boucle les mêmes comportements. Inversement, lors d’inhibition très marquée, les comportements de marquage peuvent s’amoindrir jusqu’à disparaître complètement.

Le marquage urinaire est présent autour de l’âge de quatre semaines au moment de certains jeux, puis il disparaît jusqu’à la puberté. A la puberté l’apparition de marquage urinaire est  physiologique, aussi bien chez le mâle que chez la femelle. Pensez donc à bien vérifier l’âge du chaton décrit comme malpropre et à vous faire décrire la séquence. Pour de nombreux propriétaires à 6 mois c’est encore leur « bébé chaton ».

5. Vérifier l’absence d’inhibition majeure

Un chaton est curieux, parfois imprudent mais passées les 48 premières heures de l’adoption, il doit sortir du dessous du meuble où il a pu se réfugier. Une inhibition trop importante ou trop longue doit faire craindre un syndrome de privation pour lequel une prise en charge rapide est souhaitable. La propreté ne peut pas se mettre en place s’il a trop peur de se mettre en quête de son lieu d’élimination.

6. Vérifier qu’un autre animal n’interdit pas l’accès à la caisse

  • Un chien,

qui attend avec impatience la livraison de crottes fraiches dont il est friand et qui dérange le chaton dans le déroulement de ses séquences d’élimination.

  • Un chat,

qui ne souhaite pas partager son lieu d’élimination avec le nouvel arrivant et l’empêche de s’y rendre ou d’en sortir.

V- Conclusion

Une malpropreté chez un chaton n’est jamais normale et nécessite une exploration rapide de ce symptôme. Beaucoup d’informations sont présentes sur internet à propos des malpropretés du chat, elles concernent peu le chaton qui est décrit comme facilement propre. Cette rapidité d’acquisition de la propreté est réelle, c’est pourquoi en l’absence de maladie organique, l’hypothèse de maladie comportementale doit être envisagée. Si le chaton souffre d’un trouble du développement, la rapidité de prise en charge sera le gage d’un succès et du maintien du chat dans le foyer à l’âge adulte.

Pas de conflit d'intérêt déclaré.