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> Oncogenèse : quels facteurs de risque dans le jeune âge?

Livia FERRO
Oncovet
Villeneuve D'ascq France

I- Introduction

Plusieurs facteurs ont été rapportés comme contribuant au développement de tumeurs chez le chien et le chat. Ces facteurs sont très importants et il est utile que les propriétaires d'animaux de compagnie les connaissent afin de prévenir et de réduire le risque de certains cancers.

II- Le tabac passif

Bien sûr, les animaux ne sont fumeurs, mais ils partagent l'environnement avec ses propriétaires et peuvent être exposés au tabagisme passif. Contrairement aux humains, il n'y a pas d'association entre tanagisme passif et cancer du poumon. En revanche, il semble y avoir un lien avec le carcinome nasal chez les chiens dolichocéphales. En outre, un risque accru de développer un lymphome a été signalé chez les chiens et les chats. Enfin, chez les chats, l'exposition au tabagisme passif semble être associée au carcinome épidermoïde oral.

III- Environnement rural versus urbain

Les chiens vivant dans un environnement de pollution industrielle peuvent présenter une incidence plus élevée de lymphome, de carcinome épidermoïde des amygdales et de carcinome nasal. En outre, les émissions de déchets sont associées à un risque plus élevé de cancer chez les chiens, mais pas chez les chats.

IV- Les rayons ultraviolets (UV)

Les rayons UV responsables de l'apparition de certains cancers sont de type B. Ils jouent notamment un rôle très important dans le développement du carcinome épidermoïde cutané chez les chats, en particulier chez ceux qui ont un poil blanc dans les zones de peau hypopigmentée. Les rayons UV provoquent en effet une mutation génétique de p53, l'un des principaux suppresseurs tumoraux.

V- L'amiante

Comme chez l'Homme, il est connu que l'exposition à l'amiante chez le chien est un facteur prédisposant au développement du mésothéliome, notamment la forme péricardique et en particulier chez les chiens de race Golden Retriever.

VI- Les facteurs hormonaux

Il a été rapporté que la castration précoce chez le chien mâle peut augmenter le risque de tumeurs cardiaques, d'ostéosarcome, de tumeurs de la prostate, de carcinome urothélial et de lymphome.En revanche, la castration chez les femelles peut être associée à un risque accru de développer des tumeurs cardiaques, des ostéosarcomes, des hémangiosarcomes spléniques, des mastocytomes et des lymphomes.Il a été rapporté que la castration à un jeune âge chez les chiens mâles peut augmenter le risque de tumeurs cardiaques, d'ostéosarcome, de tumeurs de la prostate, de carcinome urothélial et de lymphome.En revanche, la castration chez la femelle peut être associée à un risque accru de développer des tumeurs cardiaques, des ostéosarcomes, des hémangiosarcomes spléniques, des mastocytomes et des lymphomes.Il est important de souligner l'effet protecteur de la stérilisation contre les tumeurs mammaires rapporté dans de nombreuses études, tant chez le chien que chez le chat. Chez la chienne, le risque de développer des tumeurs mammaires en cas de stérilisation avant les premières chaleurs est très faible (0,5 %). Il augmente de 8 % si la stérilisation est effectuée entre la première et la deuxième chaleurs, et de 26 % entre la deuxième et la troisième. Après la troisième chaleur, la stérilisation ne protège pas contre les tumeurs mammaires. Chez le chatte, la stérilisation avant l'âge de 6 mois réduit le risque de tumeurs mammaires de 91 %, entre 7 et 12 mois de 86 % et entre 13 et 24 mois de 11 %.  

VII- Les facteurs viraux

Le virus de la leucémie féline (FeLV) peut augmenter considérablement le risque de cancer chez le chat. En particulier, il augmente de 62 fois le risque de lymphome chez les chats positifs.Le virus de l'immunodéficience féline (FIV) augmente le risque de lymphome, en particulier les formes extra-nodales chez les chats âgés. En outre, le FIV peut accroître la susceptibilité au carcinome épidermoïde, au carcinome mammaire, au fibrosarcome, au carcinome bowenoïde in situ et au mastocytome histiocytaire.

VIII- Les pesticides

Il est important d'informer les propriétaires de chiens que certains types d'herbicides et de pesticides peuvent être associés à un risque accru de développer un carcinome urothélial et un lymphome.

IX- Obésité

Dès les premiers mois de la vie, il est important de considérer le surpoids comme un risque de diverses maladies, dont le cancer. Les chiennes qui sont déjà obèses à l'âge d'un an semblent plus susceptibles de développer des tumeurs mammaires. En revanche, lcelles de poids normal à l'âgé de 9/12 mois présentent un risque plus faible.

X- Sarcome félin post-injection (FISS)

Ces tumeurs sont induites par une réponse inflammatoire chronique et forte au vaccin ou aux injections, avec une transformation maligne des fibroblastes et des myofibroblastes des tissus sous cutanés.Une corrélation significative entre la vaccination contre la rage et/ou le FeLV et le développement de FISS a été documentée. En outre, il a été démontré que le risque de développement de FISS augmente avec le nombre de vaccins administrés par site. Plus précisément, lorsque les vaccins sont administrés dans la zone interscapulaire, le risque de développement d'un FISS est environ 50% plus élevé que chez les chats ne recevant pas de vaccins ; ce risque augmente à plus de 127% et à plus de 175% avec l'administration de deux et de trois à quatre vaccins, respectivement. La température du vaccin a été rapporté comme facteur de risque potentiel suggérant que les vaccins devraient être réchauffés à température ambiante avant d'être administrés

Bibliographie

  1. Withrow and MacEwen's Small Animal Clinical Oncology, 6th edition (2020).2. Saba CF. Vaccine-associated feline sarcoma: current perspectives. Vet Med (Auckl). 2017 Jan 12;8:13-20.
Pas de conflit d'intérêt déclaré.

> Quels types tumoraux chez le jeune patient : synthèse des études en oncologie pédiatrique vétérinaire

Gabriel CHAMEL
Anicura Armonia
Villefontaine France

I- Introduction

Les maladies tumorales n’épargnent malheureusement pas les jeunes même si, fort heureusement, ils représentent une proportion assez faible des animaux touchés par les cancers. La physiopathologie des tumeurs retrouvés chez ces sujets est très probablement différente de celles retrouvées chez les individus âgés bien qu'il n'existe actuellement que peu de preuve en faveur de cette hypothèse chez les animaux de compagnie. L’objectif de cet exposé est de présenter les différents types tumoraux rencontrés chez les chiens et chats que l’on peut qualifier de jeunes (cette limite est d’ailleurs plutôt floue en médecine vétérinaire) que l’on peut grossièrement classer en trois grandes catégories : les tumeurs pouvant toucher toutes les catégories d’âge, que l’on retrouve donc également chez les jeunes (avec quelques spécificités parfois), les tumeurs se développant de manière préférentielle chez les jeunes animaux, et les tumeurs spécifiques des animaux jeunes.

II- Tumeurs touchant toutes les catégories d’âge

La quasi-totalité des tumeurs rencontrés en oncologie vétérinaire peuvent être observés de manière sporadique chez des animaux jeunes. Ces cas restent pour la plupart exceptionnelles. Néanmoins, pour certains néoplasmes, les jeunes représentent une partie non négligeable de la population malade.

Les hémopathies malignes sont bien représentées dans cette catégorie. Les lymphomes notamment peuvent atteindre des populations jeunes, avec des spécificités par rapport au formes rencontrés chez les individus plus âgés. Notamment, les lymphomes lymphoblastiques (chez le chien) et les lymphomes médiastinaux (chez le chat) sont plus fréquents chez les jeunes [1]. Concernant les leucémies, si les formes chroniques touchent principalement des sujets âgés, les formes aiguës peuvent toucher des animaux nettement plus jeunes.

Parmi les tumeurs cutanées, les mastocytomes peuvent toucher les individus de tout âge, sans distinction. Toutefois, les mastocytomes multicentriques, rencontrés chez les jeunes siamois, présentent un comportement biologique particulier qui les distingue des autres mastocytomes rencontré dans cette espèce. Chez le chat, les sarcomes induits par les traumatismes (sarcomes sur site d’injection, sarcome oculaire post-traumatiques) peuvent être observés chez les individus jeunes.

III- Tumeurs touchant préférentiellement le jeune

Les tumeurs de cette catégorie peuvent également toucher des individus de tout âge mais il existe une réelle prédisposition des populations plus jeunes. La plupart des tumeurs de ce groupe sont bénignes et présentent une évolution spontanée favorable. On peut citer notamment les histiocytomes cutanés [2], les papillomes oraux et les tumeurs vénériennes transmissibles.

Parmi les tumeurs malignes pouvant toucher les populations juvéniles peuvent être cités les ostéosarcomes (dont il existe un premier pic de prévalence autour de 18 mois d’âge) et les rhabdomyosarcomes (sous classes botryoïdes et alvéolaires principalement) [3,4].

IV- Tumeurs spécifiques du jeune

Ces tumeurs se développent, à partir de tissus en développement et sont donc relativement spécifiques des individus jeunes. Néanmoins, leur expression clinique, et donc leur diagnostic, peuvent être reportés à un âge plus tardif. On retrouve dans cette catégorie, la plupart des tumeurs embryonnaires (dont le nom est caractérisé par le suffixe blastome) et les tumeurs ondotogéniques inductrices de la cavité orale [5], qui touche exclusivement de jeunes chats. Les tumeurs ondontogéniques inductrices sont bénignes bien qu’infiltrantes et peuvent être guéries avec un traitement chirurgical approprié. Les tumeurs embryonnaires du jeune seront détaillées dans une autre présentation.

Bibliographie

  1. Fabrizio F, Calam AE, Dobson JM, Middleton SA, Murphy S, Taylor SS, et al. Feline mediastinal lymphoma: a retrospective study of signalment, retroviral status, response to chemotherapy and prognostic indicators. J Feline Med Surg. août 2014;16(8):637-44.
  2. Belluco S, Sammarco A, Sapin P, Lurier T, Marchal T. FOXP3, CD208, and CD206 Expression in Canine Cutaneous Histiocytoma. Vet Pathol. sept 2020;57(5):599-607.
  3. Simpson S, Dunning MD, de Brot S, Grau-Roma L, Mongan NP, Rutland CS. Comparative review of human and canine osteosarcoma: morphology, epidemiology, prognosis, treatment and genetics. Acta Vet Scand. 24 oct 2017;59(1):71.
  4. Caserto BG. A comparative review of canine and human rhabdomyosarcoma with emphasis on classification and pathogenesis. Vet Pathol. sept 2013;50(5):806-26.
  5. Gardner DG, Dubielzig RR. Feline inductive odontogenic tumor (inductive fibroameloblastoma)--a tumor unique to cats. J Oral Pathol Med Off Publ Int Assoc Oral Pathol Am Acad Oral Pathol. avr 1995;24(4):185-90.
Pas de conflit d'intérêt déclaré.

> Tout ne rime pas avec cancer chez le jeune animal : comment ne pas tomber dans des pièges lésionnels ?

Gabriel CHAMEL
Anicura Armonia
Villefontainre France

I- Introduction

Bien que les jeunes puissent être touchés par les cancers et qu’il faille penser à ces maladies malgré leur faible prévalence dans cette catégorie d'âge, certaines maladies non cancéreuses peuvent mimer des cancers dans leur présentation clinique. Il est donc important d’avoir connaissance de ces entités, parfois banales, afin d’adopter une prise en charge appropriée. 

II- Peau et tissus sous-cutané

La peau est l’organe le plus grand et le plus accessible de l'organisme. La découverte d’une masse cutanée ou sous-cutanée fait rapidement évoquer l’hypothèse d’un cancer. Cependant, chez le jeune, un abcès, un hématome, une collection kystique ou encore un granulome inflammatoire peuvent provoquer des masses. Si la confusion avec un cancer est assez rare, lorsqu’il s’agit d’abcès, d’hématome ou de kystes, elle peut l’être plus fréquemment lors de granulome, notamment lorsque l’élément causal est plus difficilement identifié (ex : migration d’un corps étranger végétal dans une localisation atypique, agent infectieux peu fréquent). De manière, moins fréquente, des hamartomes peuvent aisément être confondus avec des tumeurs cutanées. Il s’agit de formations pseudo-tumorales caractérisées par une production excessive ou une distribution anormale d’éléments d’un tissu indigène ou appartenant normalement au tissu ou à l’organe d’origine.

Certaines tumeurs cutanées, comme les lymphomes cutanés ou les carcinomes épidermoïdes, peuvent se présenter sous la forme de lésion ulcératives, squameuses ou multinodulaires. Ces présentations peuvent être mimées par des maladies infectieuses (ex : Leishmaniose chez le chien) ou des maladies du système immunitaire (ex : lupus érythémateux, granulomes éosinophiliques chez le chat).

III- Cavité thoracique

Les kystes médiastinaux sont des formations bénignes pouvant être observés dans le médiastin crânial chez le chat, dans des positions pouvant faire penser au nœud lymphatique sternal ou au thymus. Ces formations peuvent aisément être confondus avec un lymphome médiastinal voire avec un thymome [1]. De manière moins fréquente, les jabots oesophagiens, provoqués par la persistance de reliquats vasculaires, peuvent provoquer des anomalies radiographiques pouvant évoquer la présence d’une masse dans le médiastin.

Les abcès pulmonaires isolés peuvent être confondus avec des tumeurs primitives du parenchyme pulmonaires, néanmoins, cette présentation clinique est généralement moins sujette à la confusion que les lésions multinodulaires du poummons. Ces lésions sont souvent imputées à la présence d’un cancer métastatique alors qu’elles peuvent être causées par des agents infectieux, notamment parasitaires (ex : anigiostrongylose, crenosomose).

IV- Cavité abdominale

La palpation d’une assymétrie rénale marquée à l’examen clinique, ou à l’examen radiographique de l’abdomen, peut parfois amener à suspecte la présence d’un cancer rénal. Néanmoins, la présence d’une hydronéphrose secondaire à une urolithiase est largement plus fréquente chez un animal jeune, notamment chez le chat. Une hypertrophie bilatérale des reins peut être observés lors de lymphomes rénaux mais peuvent aussi être noté lors de péritonite infectieuse féline, et lors de shunts hépatiques. Toujours au sein de l’appareil urinaire, des pseudotumeurs de la vessie, correspondant à des proliférations inflammatoires, le plus souvent associé à des infections chroniques de l’appareil urinaires peuvent être confondus avec des carcinomes urothéliaux.

Concernant le tube digestif, certaines affections (dysimmunitaires pour la plupart) peuvent conduire à l’altération de la structure de la paroi digestive, jusqu’à prendre la forme de masses intestinales. Sur la base de la présentation clinique et échographique, ces lésions peuvent être indiscernables de tumeurs intestinales [2].

V- Système ostéoarticulaire

Les ostéomyélites bactériennes et fongiques provoquent des lésions osseuses caractérisées par une ostéoprolifération, une ostéolyse, une zone de transition longue et mal délimitées. Ces caractéristiques radiographiques sont le plus souvent indiscernables de celles observés lors de tumeurs osseuses primitive comme les ostéosarcomes. C’est principalement le contexte épidémio-clinique qui permet de hiérarchiser ces deux hypothèses.

Les ostéodystrophies hypetrophiques sont des maladies causant des modifications radiographiques de la région métaphysaire des os longs associés à des signes généraux, chez des chiens de race grande à géante. Ces lésions peuvent faire évoquer l’hypothèse d’une tumeur osseuse toutefois, elles sont dans la majorité des cas spontanément résolutives (3).

VI- Système hémolymphopoïétique

Les chats peuvent présenter des polyadénomégalies dites idiopathiques dont l’étiologie est mal connue mais suspectée dysimmunitaire. Cette entité peut aisément être confondue, sur la base de l’examen clinique, avec un lymphome multicentrique. De même, des maladies infectieuses (ex : mycobactérioses) peuvent provoquer des adénopathies granulomateuses multiples pouvant être confondus, sur la base de l’examen clinique toujours, avec des hémopathies malignes.

La rate est impliquée dans de multiples processus physiologiques notamment immunitaire et dans l’hématopoïèse. Ainsi, des nodules et des masses spléniques sont fréquemment observés lors de processus inflammatoire systémique ou abdominaux, ou lors de cytopénies périphériques (ex : des nodules d’hématopoïèse sont fréquemment retrouvés lors d’anémie). Ces lésions, notamment lorsqu’elles sont accompagnées, d’autres anomalies échographiques de l’abdomen (épanchement par exemple) peuvent être aisément confondus avec des lésions tumorales. Les torsions spléniques peuvent également ressembler à des tumeurs de la rate car on peut observer alors de très importante splénomégalie avec des modifications plus ou moins marquées de l’aspect du parenchyme splénique, associé à des saignements abdominaux [4].

Des anomalies du développement leucocytaires peuvent mimer des leucémies parfois, comme lors de la présence d’une anomalie de Pelger Huet, où un déficit de lobation des polynucléaires peut amener à les confondre avec des blastes circulants [5].

Bibliographie

  1. Camero CM, Neumann ZL, Garrett LD. Long-term survival in six cats with mediastinal cysts. J Feline Med Surg. oct 2019;21(10):998-1002.
  2. Linton M, Nimmo JS, Norris JM, Churcher R, Haynes S, Zoltowska A, et al. Feline gastrointestinal eosinophilic sclerosing fibroplasia: 13 cases and review of an emerging clinical entity. J Feline Med Surg. 1 mai 2015;17(5):392-404.
  3. Selman J, Towle Millard H. Hypertrophic osteodystrophy in dogs. J Small Anim Pract. janv 2022;63(1):3-9.
  4. 4. DeGroot W, Giuffrida MA, Rubin J, Runge JJ, Zide A, Mayhew PD, et al. Primary splenic torsion in dogs: 102 cases (1992–2014). J Am Vet Med Assoc. 15 mars 2016;248(6):661-8.
  5. 5. Lourdes Frehner B, Christen M, Reichler IM, Jagannathan V, Novacco M, Riond B, et al. Autosomal recessive hyposegmentation of granulocytes in Australian Shepherd Dogs indicates a role for LMBR1L in myeloid leukocytes. PLoS Genet. juin 2023;19(6):e1010805.
Pas de conflit d'intérêt déclaré.