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> Les otites allergiques du chien et du chat

Amaury BRIAND
Chv Advetia, 9 Av. Louis Breguet
78140 Vélizy-Villacoublay France

La fréquence des otites externes est souvent sous-estimée et leur diagnostic est parfois tardif. Afin d’effectuer un diagnostic le plus précoce possible il est important d’adopter les bons gestes et bons réflexes et ce dès les premières consultations.

I- Définition et fréquence

Une otite externe est une inflammation de toute ou partie de l’oreille externe, c’est à dire du pavillon auriculaire et/ou du conduit auditif externe et/ou de la région tympanique.

En général il faut considérer que la fréquence des otites externes est largement sous-estimée. Selon les études et les pays, la prévalence varie entre 7% et 20% [1]. Par exemple une étude effectuée au Royaume Uni en 2014 rapporte que l’otite externe est le problème de santé le plus souvent rapporté avec une prévalence de 10,2% [2].

Nous allons nous concentrer sur les otites externes d’origine allergiques bien qu’il existe d’autres causes.

III- Anatomie et aspect normal de l’oreille externe et patophysiologie des otites externes

Cette partie est traitée dans la présentation sur les particularités anatomiques et otites externes chez le chien.

IV- Examen otologique lors d’une otite externe

On peut distinguer plusieurs formes cliniques :

1. Otite érythémateuse 

Elle se caractérise par la présence d’un érythème plus ou moins marqué au niveau du pavillon auriculaire et/ou du conduit. En début d’évolution il n’y a pas forcément beaucoup de sécrétions ni d’hyperplasie ou de lichénification (ces lésions apparaissent après quelques jours à quelques semaines), les lésions peuvent être discrètes. Attention toutefois, dans certains cas une sténose du conduit peut être observée après seulement quelques jours, en général ces otites sont très douloureuses et purigineuses.

2. Otite cérumineuse et érythémato-cérumineuse

C’est le cas le plus fréquent : on observe en général un érythème et des sécrétions cérumineuses marrons visibles au niveau du pavillon auriculaire en face interne et dès l’entrée du conduit auditif externe. Le cérumen est plus ou moins abondant et d’aspect plus ou moins secs ou pâteux. Il arrive parfois que la présence de cérumen soit marquée avec peu d’érythème par ailleurs (souvent le cas chez les chats présentant des otites externes cérumineuses). Une sténose peut être observée rendant l’examen otoscopique compliqué, surtout en présence de sécrétions abondantes.

3. Otite purulente

Cette forme est souvent plus complexe à traiter et concerne des otites externes potentiellement plus graves et chroniques. Il est moins fréquent de rencontrer ces formes cliniques chez les jeunes animaux. Typiquement on observe la présence d’un érythème franc, voir d’érosions ou d’ulcérations de la face interne des pavillons et/ou du conduit auditif externe et il n’est pas rare qu’une sténose soit également présente. 

V- Quels outils utiliser pour l’examen otologique ?

Avant tout examen otologique plus approfondi, il convient d’effectuer un examen clinique global afin de s’assurer que l’otite externe n’est pas associée à une autre maladie ou que l’otite externe n’a pas un impact sur l’état général du chien (signes de douleurs, adénomégalie, abcès et fistule autour du conduit...).

Ensuite, l’utilisation d’un otoscope manuel portatif classique permet d’observer le conduit et la membrane tympanique (loupe et source lumineuse). Le canal opérateur permet également l’utilisation d’outils telle qu’une pince à épillet par exemple.

L’oto-endoscope, bien que moins couramment utilisé, est l’outil de choix puisqu’il permet une observation bien plus nette et détaillée de la paroi du conduit et surtout de la partie proximale et péritympanique. En outre, certains oto-endoscopes sont équipés de système de pompe afin d’effectuer des nettoyages et flushing auriculaires.

Le score OTIS-3 permet d’évaluer la gravité de l’otite de manière plus subjective en notant plusieurs critères de 0 à 3 : érythème, hyperplasie, sécrétions, ulcérations ; pour un score total allant de 0 à 12 [3].

VI- Identifier les causes possibles et mise en place du traitement

Dans le cadre des otites allergiques on ne refait pas un rappel exhaustif de toutes les causes possibles d’otite externe. On rappelle toutefois que l’on distingue les facteurs favorisants (facilitent la survenue des otites), primaires (cause directe de l’otite), secondaires (entretiennent l’otite) et perpétuants (favorisent les échecs et la récidive).

Les causes possibles à identifier et à prendre en charge dans le cadre des otites allergiques :

  • Une dermatite atopique.
  • Une allergie alimentaire (possible composante alimentaire dans la dermatite topique plutôt qu’une réelle allergie alimentaire).
  • Une réaction allergique suite à l’application d’un topique / dermatite de contact.
  • Une réaction allergique à la suite d’une parasitose.

VII- Traitement de la crise

Quelle que soit la cause sous-jacente identifiée, il faut mettre en place un traitement afin de gérer efficacement l’otite externe.

1. Critères de choix

Plusieurs critères permettent de choisir le traitement le mieux adapté :

  • Les sécrétions : la nature et la quantité des sécrétions présentes dans le conduit auditif externe sont des paramètres importants à prendre en compte pour le choix du nettoyant. En cas de sécrétions cérumineuses, on choisira un nettoyant aux vertus céruménolytiques alors qu’en cas de sécrétions purulentes on sélectionnera un produit hydrophile pour « flusher » les sécrétions. La fréquence des nettoyages sera adaptée en fonction de la quantité des sécrétions et de l’évolution clinique.
  • L’intensité de l’inflammation : on dispose de nombreux topiques traitants contenant différents dermocorticoïdes de puissances différentes à choisir en fonction du stade et de l’intensité de l’inflammation. (Cf. ci-dessous tableau : puissance relative des dermocorticoïdes disponibles en médecine vétérinaire d’après [3]).
  • Puissance relative
  • Molécule

a) Groupe IV : très puissant

Aucune molécule disponible.

b) Groupe III : puissant

  • Hydrocortisone (acéponate)
  • Mométasone (furoate)
  • Bétaméthasone (acétate, phosphate disodique, valérate)

c) Groupe II : modérément puissant

  • Triamcinolone (acétonide)
  • Dexaméthasone (acétate)*

d) Groupe I : peu puissant

  • Prednisolone

2. Examen cytologique

Il permet de caractériser et de quantifier la présence de cellules inflammatoires et de germes. Cela permet ensuite de choisir le traitement le plus adapté à la situation. Lorsqu’on observe peu ou pas de germes, il est possible de n’utiliser qu’un dermocorticoïde seul.

Il est ensuite primordial d’organiser et de prévoir des consultations de suivi afin d’évaluer l’efficacité du traitement et de contrôler la bonne résolution de l’otite. C’est également l’occasion de mettre en place les soins d’entretien proactifs.

3. Traitement proactif

Lorsque l’on identifie la source de la réaction allergique (application d’un topique par exemple, parasitisme...) on peut espérer une absence de récidive à la suite du traitement et à la résolution de l’otite externe. Néanmoins, une des particularités des otites allergiques et plus particulièrement de la dermatite atopique est l’aspect chronique et récidivant. C’est d’ailleurs un des signes d’appel précoce dans le diagnostic de la dermatite atopique.

Il est donc nécessaire de mettre en place des soins proactifs afin de limiter le risque de récidive.

Cela passe en général par :

  • des soins nettoyants hebdomadaires (ou même plus espacés si l’oreille est propre) qui permettent de réguler les sécrétions et la dysbiose ;
  • l’application de dermocorticoïdes qui permettent de prévenir toute poussée inflammatoire. Par exemple, l’instillation d’acéponate d’hydrocortisone deux fois par semaine est bien tolérée et permet de prévenir les récidives d’otite externe [4].

Le but du traitement proactif est donc de maintenir un état stable avec une inflammation très modérée (subclinique) ce qui prévient les récidives. D’autres dermocorticoïdes sont disponibles en solution auriculaire (comme l’acétonide de triamcinolone par exemple) sans autre agent actif et peuvent être à priori utilisés de la même façon.

Enfin, dans le cadre de la dermatite atopique, on rappelle qu’il est important d’intégrer la prise en charge des otites au sein d’une gestion globale multimodale avec entre autres la recherche des facteurs de poussée pouvant se traduire par la survenue d’otites externes.

Bibliographie

  1. O'Neill DG, Volk AV, Soares T, Church DB, Brodbelt DC, Pegram C. Frequency and predisposing factors for canine otitis externa in the UK - a primary veterinary care epidemiological view. Canine Med Genet. 2021 Sep 7;8(1):7.
  2. O'Neill DG, Church DB, McGreevy PD, Thomson PC, Brodbelt DC. Prevalence of disorders recorded in dogs attending primary-care veterinary practices in England. PLoS One. 2014;9(3):e90501. 
  3. Nuttall T, Bensignor E. A pilot study to develop an objective clinical score for canine otitis externa. Vet Dermatol. 2014 Dec;25(6):530-7, e91-2.
  4. Guaguère E, Bensignor E, Carlotti DN et coll. Bonnes pratiques de l’utilisation des dermocorticoïdes en dermatologie canine. Prat. Med. Chir. Anim. Comp. 2011;46(Suppl1):S1-S21.
  5. Bensignor E., Pattyn J., Reme C. (2012). Reduction of relapses of recurrent otitis externa in atopic dogs with twice-weekly topical application of hydrocortisone aceponate in the ear canal: a randomized, blinded, controlled study. Veterinary Dermatology, 23 (Suppl. 1), 2–104
Pas de conflit d'intérêt déclaré.

> Oreille et jeune chat : otite proliférative et nécrosante, polypes auriculaires chez le chat (gestion médicale, chirurgicale)MOSCA

Marion MOSCA
Vetagro Sup
Marcy L'étoile France

I- Introduction

Les otites sont des affections peu fréquentes chez le chat qui peuvent toucher l’oreille externe (pavillon auriculaire et conduit auditif externe), l’oreille moyenne et l’oreille interne. Les facteurs primaires d’otite sont les éléments qui sont capables (dans une oreille normale et à eux seuls) de déclencher une otite. Chez le chaton le facteur primaire majeur d’otite est une infestation par Otodectes cynotis à l’origine d’une « gale d’oreille ». Il existe néanmoins d’autres origines, plus rares, d’atteinte des oreilles des jeunes chats. Ainsi, les autres facteurs primaires d’otite décrits chez le chaton sont : les polypes auriculaires, la teigne, l’otite proliférative et nécrosante externe (OPNE), la démodécie et l’otite externe cérumineuse idiopathique (Persan, Siamois) [1]. Nous allons nous intéresser, dans cette présentation, à l’OPNE et aux polypes auriculaires.

II- L’otite proliférative et nécrosante externe : OPNE

Cette dermatose, rare, touche principalement le chaton (2 à 12 mois), plus rarement l’adulte.

La pathogénie est incertaine. Une réaction de cytotoxicité envers l’épiderme exercée par des lymphocytes T cytotoxiques serait à l’origine des signes cliniques.

Les lésions sont caractéristiques : plaques friables à surface irrégulière, ulcérée, sur la face interne des pavillons auriculaires, l’entrée du conduit auditif externe et parfois la partie verticale du conduit.  Ces lésions obstruent souvent le conduit et sont à l’origine de douleur et de démangeaisons. Des surinfections secondaires bactériennes ou fongiques peuvent être associées et doivent être recherchées. Des lésions peuvent être observées dans d’autres localisations : paupières, abdomen. Elles consistent en des papules et des plaques kératinisées recouvrant des érosions.

Le diagnostic repose essentiellement sur les éléments anamnestiques et cliniques. Le diagnostic définitif nécessite la réalisation de biopsies cutanées pour examen histopathologique. Le punch utilisait doit être de minimum 4 mm de diamètre. Les zones ciblées pour les biopsies sont les plaques les plus récentes et les moins ulcérées.

Une guérison spontanée en 12 à 24 mois serait possible. Le traitement de choix est l’utilisation d’un topique immunosuppresseur (dermocorticoïdes). Certains cas peuvent nécessiter l’ajout de corticothérapie systémique ou de ciclosporine.

III- Les polypes auriculaires

Le polype auriculaire inflammatoire touche essentiellement les chatons et les jeunes chats mais sont également rapportés chez des chats de tout âge. Il s’agit d’une prolifération bénigne prenant naissance au niveau de l’épithélium tapissant la bulle tympanique, le nasopharynx ou la trompe d’Eustache.  Les chats atteints sont présentés pour des symptômes d’otite (externe ou moyenne) qui peuvent être associés à des symptômes vestibulaires, respiratoires, des écoulements oculaires, des blépharospasmes ou un syndrome de Horner. Le polype est, le plus souvent, unilatéral mais peut également être bilatéral (24% des cas dans un étude).

La recherche de facteur primaire permet de visualiser le polype qui a une forme de nodule, rose à rouge, d’aspect lisse facilement observable grâce à un examen otoscopique ou vidéo otoscopique s’il est présent dans le conduit auditif externe. Il peut également être confiné à la bulle tympanique et son observation nécessitera un examen d’imagerie plus poussé (examen tomodensitométrique, scanner). Des facteurs secondaires sont fréquemment associés (bactéries).

En cas de suspicion ou de visualisation d’un polype auriculaire inflammatoire, un examen tomodensitométrique est recommandé pour déterminer son extension, confirmer le diagnostic et explorer une éventuelle atteinte bilatérale. Le diagnostic définitif repose sur les résultats de l’examen histopathologique réalisé sur le nodule après exérèse.

Le traitement repose sur la traction avulsion du polype s’il est visible et que les résultats des examens d’imagerie confirment la possibilité de réaliser cette technique. Sinon, l’ostéotomie ventrale de bulle tympanique. Dans les deux cas, des effets indésirables peuvent se produire après intervention (syndrome de Horner, symptômes vestibulaires, hémorragie et paralysie du nerf facial). La bullotomie ventrale est une intervention plus invasive et peut entrainer un plus grand risque de réactions indésirables mais les risques de récidive semblent moins élevés avec cette technique comparée à la technique de la traction/avulsion. L’administration de corticoïdes après traction avulsion permet néanmoins d’éviter les récidives dans 100% des cas traités. D’autres techniques ont également été décrites (technique trans-tympanique per-endoscopique pour le retrait des polypes par traction suivi d’un curetage de la bulle et approche latérale au conduit auriculaire suivie par traction avulsion profonde).

Bibliographie

  1. Anderson DM et coll. Management of inflammatory polyps in 37 cats. 12. Vet Rec 2000; 147: 684-687.
  2. Brame B, Cain C. Chronic otitis in cats: clinical management of primary, predisposing and perpetuating factors. JFMS 2021;5:433-446.
  3. Hoppers SE et coll. Feline bilateral inflammatory aural polyps: a descriptive restrospective study. Vet Dermatol 2020; 31:385-e102.
  4. Panzuti P et coll. Extra-auricular lesions of proliferative and necrotizing otitis externa in three kittens. Vet Dermatol 2021 ; 32 : 385-e110.
  5. Vidémont E, Pin D. Proliferative and necrotizing otitis in a kitten. First demonstration of T-cell mediated apopotosis. J Small Anim Pract 2010; 51: 599-603.
Pas de conflit d'intérêt déclaré.

> Particularités anatomiques chez le chien (cocker spaniel, shar pei, malformation voile palais, CKC BF)

Amaury BRIAND
Chv Advetia, 9 Av. Louis Breguet - 78140 Vélizy-Villacoublay (France)
France

I- Introduction

L’otite externe est un des motifs de consultation les plus fréquents et il n’est pas rare de diagnostiquer une otite externe chez un animal présenté pour un autre motif [1]. On rappelle que dans la pathogénie de l’otite externe on distingue schématiquement des facteurs favorisants, primaires, secondaires et perpétuants. Les facteurs favorisants ne sont pas suffisants à eux seuls pour provoquer une otite externe mais en facilitent la survenue : ce sont en général des particularités anatomiques propres à certaines races et il est important de les connaître pour sensibiliser les propriétaires, et ce dès les premières consultations vaccinales. Cela permet d’adopter les bons gestes et de prévenir la survenue future d’otites externes.

II- Rappels anatomiques et pathophysiologiques [2]

On distingue plusieurs parties distinctes avec différentes caractéristiques importantes à connaître.

  • Le pavillon auriculaire : c’est la partie la plus externe, elle est très mobile chez le chien et le chat qui peuvent, contrairement à l’être humain, modifier leur orientation afin de capter le son de façon optimale. Il existe de nombreuses formes différentes selon les races mais on distingue globalement des pavillons auriculaires à port dressé, semi tombant et tombant.
  • Le conduit auditif externe : ce dernier est plus long que chez l’Homme, on distingue une portion verticale et une portion horizontale. Outre la présence de tissus cartilagineux qui confère à l’oreille sa souplesse ainsi qu’une certaine rigidité, le système glandulaire auriculaire est particulier avec la présence de glandes cérumineuses, en plus des glandes sébacées. Ce système glandulaire particulier permet la production de cérumen qui participe à la protection de l’épithélium auriculaire. La densité de glande cérumineuse est plus importante en région tympanique puis diminue vers la portion verticale du conduit tandis que c’est l’inverse pour la densité des glandes sébacées.
  • La région péritympanique : c’est la région située en avant du tympan. On distingue souvent une petite touffe de poil dans cette région.
  • La membrane tympanique : ou tympan. C’est une fine membrane composée de deux parties : la pars flaccida charnue et vascularisée et la pars tensa très fine et transparente. Lorsque l’on effectue une paracentèse il est important de passer à travers la pars tensa qui se situe en général dans le cadrant inférieur de la membrane tympanique.
  • L’oreille moyenne : encore appelée bulle tympanique, est une caisse de résonnance osseuse au contenu aérique que l’on ne peut pas visualiser à l’examen otoscopique. Elle est située en arrière de la membrane tympanique. Chez le chat on observe une particularité anatomique : la présence d’un septum osseux qui divise la bulle tympanique en deux parties (latérale dorsale / médiale ventrale).
  • La chaîne des osselets : enclume, marteau et étrier qui permettent la bonne conduction des ondes sonores vers l’oreille interne.
  • L’oreille interne : petit organe composé des appareils cochléaires et vestibulaires responsables de l’audition et de l’équilibre.

III- Pathophysiologie des otites externes

La caractéristique commune de toute otite est l’inflammation du conduit auditif externe.

Cette inflammation est plus ou moins marquée et concerne l’épithélium qui tapisse le conduit auditif externe.

L’inflammation entraîne une hyperplasie des glandes cérumineuses avec une production accrue de sécrétions qui encombrent la lumière du conduit. Ce mécanisme est aggravé par le ralentissement voire l’arrêt de l’effet « tapis roulant » qui permet normalement le renouvellement de l’épithélium et l’évacuation naturelle des débris.

L’inflammation et la présence de sécrétions favorisent la prolifération microbienne et donc la survenue de surinfections, ce qui aggrave et entretient l’otite externe.

Enfin, avec la chronicité des lésions, on observe des complications telles que : sténose, métaplasie osseuse, otite moyenne...

IV- Particularités anatomiques et facteurs favorisants

Certaines particularités anatomiques favorisent la survenue d’une inflammation et/ou l’accumulation de sécrétions ce qui créer un terrain favorable à la survenue de l’otite externe.

1. Caniches, bichons, shih-tzus : hypertrichose du conduit

Les races présentant un pelage à croissance lente et continue comme les caniches, les bichons, les shih-tzu etc. présentent souvent une hypertrichose auriculaire. On observe alors de volumineuses « mèches » de poils dans le conduit auditif externe et cela peut favoriser la formation de bouchons avec rétention de sécrétions cérumineuses. Cette accumulation de matériel peut favoriser la prolifération de microorganismes ou bien les macérations. Enfin, des soins nettoyants et toilettages trop intensifs avec notamment l’épilation des conduits peuvent dans certains cas entraîner des irritations.

2. Sharpeis, bouledogues et carlin : sténose du conduit

Ces races présentent naturellement une sténose des conduits auditifs externes ainsi que des replis anormaux en région distale. Typiquement, les Sharpeis (et dans une moindre mesure les Carlins) présentent très souvent une sténose et des replis visibles en région distale (dès l’entrée du conduit auditif externe). Les Bouledogues présentent quant à eux une sténose proximale (proche du tympan) ce qui peut favoriser l’accumulation de matériel en région tympanique. Ces différentes mal-conformations contribuent à une rétention de matériel cérumineux, des frottements et irritations plus fréquentes ainsi qu’à une humidité et des macérations plus importantes. Tous ces paramètres facilitent donc la survenue d’otite externe, et ce d’autant plus que ce sont déjà des races prédisposées à la dermatite atopique...

3. Cockers et spaniels : système glandulaire particulier et otites purulentes, risques d’épillets

Les Cockers spaniels, et plus particulièrement les Cockers américains sont particulièrement à risque d’otites externes graves : otites ulcératives avec nécessité de prise en charge chirurgicale par TECLABO [3]. 

Cette prédisposition est liée à plusieurs caractéristiques [3][4] :

  • Une densité de glande cérumineuse plus importante
  • Des follicules pileux composés plus nombreux
  • Un conduit long avec des oreilles tombantes

Ces particularités favorisent la production de cérumen et une humidité plus importante avec un risque de macération et de prolifération microbienne accru. De plus, lors d’inflammation, les glandes cérumineuses des Cockers semblent particulièrement sujettes à l’hyperplasie ce qui aggrave le phénomène.

Enfin, les longs pavillons pendants et les poils longs sont des facteurs qui augmentent le risque de migration d’épillets dans le conduit auditif externe et donc la survenue d’otite externe.

V- Port semi tombant et othématome [5]

Une récente étude effectuée en Angleterre montre un lien entre othématome et la forme semi tombante et en V des pavillons auriculaires dans certaines races. Le cartilage serait plus fragile du fait de la forme particulière et du pli présent au milieu du pavillon ce qui faciliterait la survenue d’othématome lors de chocs répétés comme lorsque le chien se secoue la tête.

1. Cavalier King Charles : otites moyennes sécrétantes primaires [6]

En plus d’être une race à risque d’otite externe : brachycéphale, à oreille tombante et prédisposée à la dermatite atopique, les Cavalier King Charles sont prédisposés aux otites moyennes sécrétantes primaires.

Elles sont consécutives à l’accumulation d’un mucus particulièrement épais et gélatineux qui comble l’oreille moyenne. Cette accumulation est probablement liée à la conformation brachycéphale (avec possible influence de l’épaisseur du palais mou) et à un défaut d’évacuation du mucus via la trompe d’Eustache.

De nombreux Cavalier King Charles ne présentent pas de signe clinique. Néanmoins le signe d’appel le plus fréquent est l’apparition progressive d’une surdité. On peut également observer un prurit auriculaire, un chien qui se secoue la tête, des douleurs ou une gêne à la mastication et plus rarement une perte d’équilibre ou un syndrome vestibulaire.

Pour confirmer le diagnostic plusieurs examens sont réalisables :

  • L’examen otoscopique : il révèle un bombement caractéristique de la pars flaccida.
  • En cas de doute un examen d’imagerie (scanner ou IRM) confirmera la présence d’une otite moyenne
  • Un potentiel auditif évoqué (PEA) permet d’objectivité la surdité partielle ou totale et l’origine de la surdité.

Le traitement de choix est la paracentèse afin de retirer le mucus accumulé dans l’oreille moyenne. Néanmoins, les récidives sont fréquentes car une fois le tympan cicatrisé, le mucus peut de nouveau s’accumuler dans l’oreille moyenne. La récidive est alors observée parfois rapidement en quelques semaines. Un traitement post opératoire est préconisé avec des glucocorticoïdes à dose anti inflammatoire durant une à deux semaines. L’utilisation d’une antibiothérapie systémique est également rapportée afin d’éviter toute infection secondaire de l’oreille moyenne. L’utilisation de topiques n’est pas conseillée.

Il existe des dispositifs comparables aux yoyos (drain de tympanostomie) utilisés chez les enfants, ce sont des petits tubes posés après paracentèse et qui permettent l’écoulement des sécrétions.  Certains auteurs conseillent l’utilisation de N-acétylcystéine per os pour ses vertus mucolytiques.

VI- Aborder l’otologie dès la première consultation

Dès les premières consultations vaccinales il est important d’effectuer un examen otologique complet :

  • Palpation des conduits 
  • Examen otoscopique
  • Examen cytologique si anomalie (érythème, cérumen)

Sur les chiens de race prédisposée il est important de sensibiliser les propriétaires au risque d’otite externe et d’aborder les points suivants :

  • Définir une otite externe : la majorité des propriétaires assimilent les otites à des atteintes / affections profondes, très douloureuses avec rupture tympanique par homologie avec leur propre expérience en médecine humaine. Il faut donc prendre le temps d’expliquer qu’une simple rougeur ou des sécrétions trop abondantes suffisent à évoquer un diagnostic d’otite externe.
  • Les signes d’appel de l’otite externe : rougeurs, sécrétions, prurit (préciser les différentes formes de prurit : se gratte, se secoue la tête...), mauvaise odeur.
  • Les soins nettoyants à effectuer régulièrement de manière préventive et pour habituer les chiens à la manipulation : bien expliquer puis montrer les bons gestes durant la consultation pour effectuer un nettoyage complet. Discuter des soins locaux et toilettages tels que l’épilation qui n’est pas nécessaire chez un chien en bonne santé.
  • Discuter des causes primaires les plus fréquentes : parasites (otodectes), dermatite atopique, corps étrangers...

Plus les explications seront complètes et plus le diagnostic d’une otite externe sera précoce et sa prise en charge optimale.

Bibliographie

  1. O'Neill DG, Volk AV, Soares T, Church DB, Brodbelt DC, Pegram C. Frequency and predisposing factors for canine otitis externa in the UK - a primary veterinary care epidemiological view. Canine Med Genet. 2021 Sep 7;8(1):7.
  2. Nuttall T. Managing recurrent otitis externa in dogs: what have we learned and what can we do better? J Am Vet Med Assoc. 2023 Apr 7;261(S1):S10-S22.
  3. Engdahl KS, Brodbelt DC, Cameron C, Church DB, Hedhammar Å, O'Neill DG. Demography and disorders of English Cocker Spaniels under primary veterinary care in the UK. Canine Med Genet. 2023 May 19;10(1):4
  4. Kaimio M, Malkamäki S, Kaukonen M, Ahonen S, Hytönen MK, Rantala M, Lohi H, Saijonmaa-Koulumies L, Laitinen-Vapaavuori O. Clinical and Genetic Findings in 28 American Cocker Spaniels with Aural Ceruminous Gland Hyperplasia and Ectasia. J Comp Pathol. 2021 May;185:30-44. 
  5. O’Neill, D.G., Lee, Y.H., Brodbelt, D.C. et al. Reporting the epidemiology of aural haematoma in dogs and proposing a novel aetiopathogenetic pathway. Sci Rep 11, 21670 (2021).
  6. Cole LK. Primary secretory otitis media in Cavalier King Charles spaniels. Vet Clin North Am Small Anim Pract. 2012 Nov;42(6):1137-42.
Pas de conflit d'intérêt déclaré.