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> L'approche de l'ophtalmologue

Gilles CHAUDIEU
Aucune

I- La situation actuelle

L’ACVO et l’ECVO ont produit des fiches recensant les MOH-PH par race pour les chiens. L’ECVO propose des fiches chez 31 races félines sur les 63 reconnues par le LOOF. Des statistiques par races et maladies sont disponibles sur le site AFEP/MHOC. Toutes ces données sont actualisées

La mise en œuvre d’une politique de sélection confronte obligatoirement les références bibliographiques à la réalité du terrain.

L’examen d’un grand nombre de sujets pour construire des pedigrees d’étude, dans lesquels les atteints ont un phénotype caractérisé (âge d’apparition des symptômes, lésions typiques, évolution prévisible) est indispensable pour proposer un mode de transmission présumé [1]. Un certain nombre de maladies se développent chez l’adulte. Certains instituts spécialisés peuvent entretenir sur plusieurs générations des colonies dédiées à leur étude [2].

La recherche en génétique a permis d’identifier des mutations responsables de MOH-PH. Les tests issus de cette recherche ne sont proposés par les laboratoires commerciaux qu’après validation chez un nombre suffisant de sujets concernés [3]. Certains tests utilisés sans examen clinique ont produit de faux résultats favorables ; l’usage de certains autres a dépisté des faux négatifs et positifs, parce que la mutation identifiée était fortement associée à la maladie mais non causale [4].

II- Conditions de l’examen oculaire de dépistage

L’ophtalmologue mentionne tout ce qu’il remarque, le certifie sur un formulaire AFEP/MHOC ou européen ECVO acceptés par les clubs de races français, la SCC et le LOOF. Pour être exploitable, la rédaction doit être aussi homogène que possible, l’examen oculaire réalisé selon une procédure codifiée [5] :

  • définitions, lignes directrices, recommandations et informations mises à jour tous les ans par un comité d’experts; données publiées et observations rapportées par les représentants de chaque panel national  prises en compte;
  • protocole d’examen complet, reproductible, appliqué par les spécialistes et les examinateurs certifiés (formation théorique et pratique validée par la réussite à un examen) ;
  • examinateurs capables de reconnaître, interpréter comme pertinents ou non les signes cliniques observés en relation avec une/plusieurs MOH-PH ;
  • information transmise et accessible aux clubs de races et à leurs organisations fédératives, aux éleveurs et aux propriétaires.

III- Critères d’inclusion

Une affection oculaire est qualifiée de MOH-PH si elle répond aux critères suivants :

  • avoir fait l’objet d’une publication dans une revue à comité de lecture, ou dans un congrès national ou international, ou avoir été rapportée à l’organisation nationale de dépistage par un(des) examinateur(s);
  • présenter une émergence significative dans un effectif racial. Le déterminisme autosomique récessif étant majoritairement impliqué dans les MOH-PH, les avantages sélectifs conférés à certains reproducteurs augmentent la fréquence des homozygotes, donc la morbidité des maladies. Dans un effectif dérivant d’un petit groupe d’individus, un allèle délétère rare peut être fixé en quelques générations ; dans un grand effectif, en l’absence de repérage des porteurs, la sélection est réalisée par élimination des homozygotes atteints de la reproduction [8, 9], et le portage majoritaire d’un allèle muté par les hétérozygotes maintient au bout du compte sa fréquence [6]. Sans généalogie ni test génétique, on peut considérer, comme le préconise l’ACVO Genetics Committee, qu’un minimum de 50 sujets atteints détectés sur une période de 5 ans par des examens annuels conduit à considérer une maladie comme présente dans un effectif [7] ;
  • réévaluer tous les ans le statut d’un l’effectif racial relativement aux MOH- PH par les responsables du panel national d’examinateurs et ceux de la Commission d’élevage.

Une maladie rapportée par un(des) examinateur(s) n’ayant pas fait l’objet de publication, ou non signalée dans les statistiques nationales devrait être qualifiée d’émergente.

IV- Protocole d’examen

Il est fixé pour la France par le Conseil d’administration de l’AFEP/MHOC, par le HED Committee pour l’ECVO.

La standardisation et la qualité de l’examen sont la base d’une politique efficace de dépistage des MOH-PH :

  • identité du sujet vérifiée ; 
  • comportement visuel apprécié, puis clignement à la menace, réflexes d’éblouissement et photomoteurs pupillaires testés;
  • examen effectué en ambiance assombrie pour l’œil (segment antérieur, segment postérieur) et ses annexes;
  • examen biomicroscopique des annexes et du segment antérieur réalisé, test de Schirmer et examen gonioscopique mis en œuvre si nécessaires, avant l’instillation d’un collyre collyre mydriatique de courte durée d’action ; biomicroscope pouvu au minimum un grossissement x10 ;
  • après mydriase, observation biomicroscopique du cristallin et du vitré ; examen du fond d’œil  à l’ophtalmoscope indirect équipé des lentilles adaptées ;
  • examens complémentaires : si nécessaires pour préciser ou porter un diagnostic, selon un protocole reconnu [10], en accord avec le propriétaire ou son représentant informés de la nécessité d’une éventuelle anesthésie générale ; programmés dans les meilleurs délais et indiqués sur le certificat ; mesure de la sécrétion lacrymale, de la pression intraoculaire et gonioscopie (examens complémentaires) effectuées avant instillation du collyre mydriatique ;
  • indépendamment des rubriques à cocher obligatoirement, toute anomalie relevée durant l’examen, quelle qu’en soit l’origine est mentionnée dans la partie commentaires ;
  • schémas du formulaire pour situer une lésion complétés, sa photographie réalisée chaque fois que c’est possible.

Le certificat établi devrait être valable pour une année durant la carrière de reproduction [5]. Cette validité reste malheureusement tributaire du choix du Club intéressé.

Un animal est déclaré « atteint » si des signes de MOH-PH sont présents, « indemne » s’ils ne le sont pas, mais l’examen peut ne pas être définitivement conclusif : « douteux » si des signes cliniques qui pourraient correspondre à la maladie mais pas assez spécifiques sont présents, « suspect » si des signes cliniques minimes sont spécifiques de la maladie et que leur progression confirmera le diagnostic lors d’un prochain examen quelques mois plus tard (6 à 12) [5].

Une procédure d’appel est fixée en cas de contestation du diagnostic par le propriétaire de l’animal ([5], article 18 des statuts de l’AFEP/MHOC).

V- Conseil d’élevage 

L’examinateur met en évidence des signes cliniques, qu’il détecte et interprète comme pertinents ou non. Il est fondé à donner un avis, dont l’éleveur est demandeur ; il le formulera en fonction du caractère invalidant de la maladie pour la vision et/ou de son incidence sur le bien-être de l’animal et potentiellement des apparentés (douleur, nécessité de traitement lourd ou au long cours).

Il peut demander l’aide d’un généticien, recourir à des examens complémentaires (test génétique notamment), si les données cliniques ou la race l’y invitent. Il doit se rappeler qu’un test génétique détecte une mutation et son examen une maladie [3].

Voici une proposition de formulation du conseil d’élevage :

  • au choix de l’éleveur : l’affection est présumée héréditaire, sans que la preuve scientifique de son mode de transmission n’ait été apportée, et sans qu’elle soit susceptible d’engendrer une cécité, ou qu’elle affecte une des capacités fonctionnelles de l’œil, ou qu’elle induise douleur ou mal-être chez le sujet atteint ; lors de déterminisme polygénique présumé, l’éleveur est invité à marier un sujet peu affecté à un homologue sain [9].
  • non : ne pas utiliser le sujet atteint en élevage dans la mesure où l’affection est présumée héréditaire, avec de solides arguments en faveur de son mode de transmission, et/ou si elle susceptible d’engendrer une cécité, ou d’affecter une des capacités fonctionnelles de l’œil, ou d’induire douleur ou mal-être chez le sujet atteint ;
  • non pour le sujet atteint, ses parents et sa progéniture : dans la mesure où l’affection est présumée autosomique récessive, et si elle est susceptible d’engendrer une cécité, ou d’affecter une des capacités fonctionnelles de l’œil, ou d’induire douleur ou mal-être chez le sujet atteint. Si un test génétique existe, les porteurs sains détectés pourront exceptionnellement être utilisés en élevage (qualités remarquables, petit effectif racial), tous les produits en résultant étant testés.

Le conseil d’élevage de l’examinateur dépend de son examen, pas du test génétique : si un animal est atteint d’APR, qu’un test dédié à une APR décrite dans la race le qualifie de sain, il n’en reste pas moins atteint d’APR, qui peut être déterminée par une mutation différente dans la même race [5].  

La recommandation peut varier selon la gravité des signes cliniques pour une même maladie : un entropion sans lésion cornéenne laisse au choix de l’éleveur l’usage du reproducteur ; s’il est qualifié de « sévère » (lésions cornéennes, douleur), le conseil d’élevage sera « non ».

Si la fonction visuelle ou le bien-être peuvent être affectés, l’héritabilité des maladies doit être considérée comme établie sauf si la preuve du caractère acquis peut être apportée [5] : cataracte traumatique, phtisis bulbi versus microphtalmie…

Abréviations

  • ACVO : American College of Veterinary Opthalmologists
  • AFEP/MHOC : Association of French Eye Panellists/ Maladies Héréditaires Oculaires des Carnivores
  • APR : Atrophie Rétinienne Progressive
  • ECVO : European College of Veterinary Opthalmologists
  • HED : Hereditary Eye Diseases
  • LOOF : Livre Officiel des Origines Félines
  • MOH-PH : Maladies Oculaires Héréditaires ou Présumées Héréditaires
  • SCC : Société Centrale Canine

Bibliographie

  1. Bunel M, Chaudieu G, Brabet Ph, Hamel C, Hitte C, Lagoutte L, Botherel N, Pilorge Ph, André C and Quignon P. Natural models for retinitis pigmentosa: progressive retinal atrophy in dog breeds. Human Genetics 2019 https://doi.org/1007/s004001
  2. Aguirre GD, Acland GM. Models, mutants and man: searching for unique phenotypes and gene in the dog model of retinal degeneration. The dog and its genome 2006; Cold Spring Harbor Laboratory Press, New York:23
  3. André C, Guaguère E, Chaudieu G, Genevois J-P, Devauchelle P. intérêt du chien dans la pathologie et la génétique comparées. In: standards, santé et génétique chez le Chien/ Standards, health and Genetics in dogs. Guintard C et Leroy G, eds. FCI-SCC éd: 2017; pp 3
  4. Kuznetsova T, Iwabe S, Boesze-Battaglia K, Pearce-Kelling S, Chang-Min Y, McDaid K et al. Exclusion of RPGRIP1 ins44 from Primary Causal Association with Early-Onset Cone-Rod Dystrophy in Dogs. Investigative Ophthalmology and Visual Science. 2012; 53: 5450
  5. ECVO Manual : Known and presumed hereditary eye diseases in dogs and cats.www.ecvo.org;20
  6. Philippe N. Génétique des populations. Collège National des Enseignants et Praticiens de Génétique Médicale, Département de génétique médicale, Marseille. Université Médicale Virtuelle Francophone, Support de Cours; 2020
  7. Genetics Committee of the American College of Veterinary Ophthalmologists. Ocular disorders preumed to be inherited in purebred dogs. 11th ed. www.acvo.org, © American College of Veterinary Ophthalmologists; 20
  8. Denis B. Génétique et pathologie: considérations générales. In: Génétique et sélection chez le chien. Seconde édition. Paris: PMCAC-SCC; 2007, pp 1
  9. Denis B. Conseil génétique. In: Génétique et sélection chez le chien. Seconde édition. Paris: PMCAC-SCC; 2007, pp 30
  10. Ekesten B, Komáromy AM, Ofri R, Petersen-Jones SM, Narfström K. Guidelines for clinical electroretinography in the dog: 2012 update. Doc Ophthalmol DOI 1007/s1060938, published online: 01 June, 20
Pas de conflit d'intérêt déclaré.

> L'approche du cardiologue

François SERRES
Oncovet
Villeneuve D'ascq France

Suite à la mise en évidence de prédispositions raciales pour certaines cardiopathies congénitales et acquises, la réalisation d’examens de dépistage a été proposée ces vingt dernières années. À la connaissance du présentateur, des tests de dépistages sont actuellement préconisés :

  • pour les cardiopathies congénitales (sténoses pulmonaire et/ou sous-aortique) pour le Boxer, Terre-Neuve, Bouledogue français, Bouledogue anglais et Dogue de Bordeaux.  Ces examens reposent sur l’auscultation et la réalisation d’un examen au mode Doppler continu des flux aortique et pulmonaire, associé à des mesures au mode 2D et TM de la morphologie cardiaque  ;
  • pour la cardiomyopathie dilatée chez le Doberman, le Dogue allemand, l’irish Wolfhound et le Dogue de Bordeaux. Ces examens reposent sur la réalisation d’un examen au mode 2D et TM de la morphologie cardiaque, avec des mesures volumétriques préconisées pour le Doberman ;
  • pour la maladie valvulaire mitrale chez les Epagneuls anglais (King Charles et Cavalier King Charles). Cet examen repose sur l’auscultation et la réalisation d’examen au mode 2D de la morphologie de la valve mitrale, avec recherche d’un prolapsus valvulaire sur une coupe grand axe 5 cavités réalisé par voie parasternale gauche. Des protocoles relativement proches mais reposant sur une coupe 4 cavités ont été proposés en Scandinavie ;
  • pour la CMH, aucun test n’est exigé mais la participation à une banque de données accessible (pawpeds) est proposée aux éleveurs de chats de races.

Les critères diagnostiques, les examens demandés, les images fournies et le mode de classification (par le vétérinaire réalisant l’examen ou par un relecteur unique) varie selon les clubs de race, avec des différences majeures. La mise en place d’un programme de dépistage se heurte à plusieurs obstacles :

  • choix de l’outil de dépistage approprié : l’examen échocardiographique est aujourd’hui le principal outil employé. L’auscultation a été un temps utilisée, en proposant par exemple la classification en « malade » de tout Boxer présentant un souffle systolique basal gauche. Cette méthode a clairement montré ses limites, avec à la fois un risque de faux négatifs (lors d’auscultation difficile ou selon le degré d’expérience et de spécialisation du vétérinaire) et surtout de faux positifs (avec la présence de souffles physiologiques de chiens sportifs chez de nombreux jeunes Boxers). Pour être efficace, l’examen doit pouvoir être réalisé à grand échelle, par des vétérinaires non spécialistes, et donc reposer sur des examens au mode 2D, TM ou Doppler facilement réalisables. L’emploi de techniques plus récentes et/ou d’interprétation plus délicate (Doppler tissulaire, échographie 3D, examen au mode Speckle tracking) ne sera le plus souvent pas considérée ;
  • détermination des valeurs « seuils » et classification des patients : la bonne classification des patients demande d’une part la détermination de valeurs normales et la détermination de valeurs-seuils pathologiques. La classification peut être établie par le vétérinaire réalisant l’examen ou par un relecteur unique, ce qui permet d’uniformiser les résultats donnés, notamment pour les cas « douteux ». Ce point est particulièrement important pour le Boxer, chez qui la distinction entre une sténose aortique minime et une accélération physiologique peut être délicate ;
  • choix de l’âge à partir duquel un animal peut être dépisté. Il est parfois difficile de déterminer à quel âge un examen permet d’affirmer qu’un patient est « sain ». Si pour la plupart des cardiopathies congénitales, la gravité de l’affection est établie dès la naissance, une nette progression de la maladie peut être observée au cours de la croissance lors de sténose aortique. Cette particularité justifie l’âge minimal de 12 mois demandé pour les dépistages de cardiopathie congénitale. Concernant les maladies acquises, l’intérêt d’un examen de dépistage très précoce est beaucoup plus discutable. La prévalence des CMD et CMH avant l’âge de deux ans est extrêmement faible, et un examen parfaitement normal à cet âge ne permet en aucun cas d’exclure le développement ultérieur d’une maladie. Le suivi jusqu’à un âge avancé des reproducteurs (y compris après leur période d’activité) est probablement préférable.

L’objectif de cette démarche de dépistage est avant tout de diminuer la prévalence des affections. Le bénéfice de certains de ces programmes a pu être évalué, et il a été montré en Italie, mais également en France, que la prévalence des malformations cardiaques a globalement diminué chez les Boxers présentés aux examens de dépistage depuis la mise place de ces protocoles. Cet apparent bénéfice de la démarche de dépistage présente cependant plusieurs limites :

- la réalisation de ces examens n’est jamais obligatoire, et cet examen ayant un coût, seule une partie des animaux est présentée aux examens de dépistage (10% de la population de Boxers en France) et cette population peut subir un biais de sélection (un animal présentant un souffle de forte intensité n’étant potentiellement pas présenté en dépistage) ;

- l’envoi du test au lecteur devant être fait par le propriétaire, on ne peut exclure que certains propriétaires n’envoient pas un examen nettement défavorable (pour éviter des frais de lecture notamment), faussant ainsi les résultats. Cette limite n’est pas présente sur le fichier pawpeds, pour lequel un accord du propriétaire pour la publication des résultats est normalement demandé AVANT réalisation de l’examen ;

- La détermination du mode de transmission n’est pas encore établie avec certitude pour toutes les races, avec des transmissions récessives (chez le Golden retriever, le Dogue de Bordeaux ou le Rottweiler) ou dominantes à polygéniques (chez le Terre-Neuve). Les plans de reproduction « idéaux » ne sont donc pas toujours établis, la mise à la reproduction d’un Boxer atteint de sténose sous-aortique minime n’étant ainsi pas déconseillée (en évitant les accouplements de deux animaux atteints) ;

- On ne dispose pas de données publiées dans des revues à comité de lecture concernant le bénéfice du protocole de dépistage proposé pour le Cavalier King Charles. Une étude publiée a montré un bénéfice du protocole appliqué au Danemark, avec une diminution nette de la prévalence des souffles cardiaques et du degré de prolapsus mitral chez les descendants d’animaux ayant participé à un protocole de dépistage. Les protocoles de dépistage n’étant à nouveau pas appliqués chez tous les descendants mais seulement chez ceux destinés à la reproduction, le bénéfice exact reste à confirmer.

Malgré des premiers résultats très encourageants, il est donc encore difficile d’affirmer que la diminution de prévalence ou de gravité des maladies observée chez les animaux présentés aux examens de dépistage depuis la mise place de ces protocoles est associée à une diminution de la prévalence de la maladie dans la population globale.

Bibliographie

  1. Birkegård AC, Reimann MJ, Martinussen T, Häggström J, Pedersen HD, Olsen LH.Breeding Restrictions Decrease the Prevalence of Myxomatous Mitral Valve Disease in Cavalier King Charles Spaniels over an 8- to 10-Year Period. J Vet Intern Med 2016;30:63–68
  2. Oliveira P, Domenech O, Silva J, Vannini S, Bussadori R, Bussadori C. Retrospective review of congenital heart disease in 976 dogs. J vet Intern med 2011 May-Jun;25(3):477-83.
  3. Ontiveros ES, Fousse SL, Crofton AE, Hodge TE, Gunther-Harrington CT, Visser LC, Stern JA. Congenital Cardiac Outflow Tract Abnormalities in Dogs: Prevalence and Pattern of Inheritance From 2008 to 2017. Front Vet Sci
  4. Bernard P. Résultat du programme de dépistage clinique, échocardiographique et doppler des sténoses artérielles chez le boxer en france : 2 735 boxers entre 2005 et 2019. Thése pour obtenir le diplôme d’État de docteur vétérinaire, Alfort 2020
  5. Brambilla PG, Polli M, Pradelli D, Papa M, Rizzi R, Bagardi M, Bussadori C. Epidemiological study of congenital heart diseases in dogs: Prevalence, popularity, and volatility throughout twenty years of clinical practice. Plos One 2020 Jul 27;15(7)
  6. Bussadori C, Pradelli D, Borgarelli M, Chiavegato D, D'Agnolo G, Menegazzo L, Migliorini F, Santilli R, Zani A, Quintavalla C. Congenital heart disease in boxer dogs: results of 6 years of breed screening. Vet J 2009 Aug;181(2):187-92.
Pas de conflit d'intérêt déclaré.

> L'approche du neurologue (surdité)

Vincent MAYOUSSE
Chv Des Cordeliers
Meaux France

I- Rappels anatomiques succincts du système auditif

Après avoir cheminé dans le conduit auditif externe (composant, avec le pavillon, l’oreille externe), l’onde sonore fait vibrer la membrane tympanique. Celle-ci transmet l’onde sonore à la chaine d’osselets (au nombre de 3), présents dans la bulle tympanique (oreille moyenne). Les osselets transmettent l’onde sonore vers la cochlée (partie de l’oreille interne, avec l’appareil vestibulaire), laquelle transforme l’onde mécanique en signal électrique. Ce signal est transmis vers les noyaux cochléaires du tronc cérébral (portion rostrale de la moelle allongée) via la portion cochléaire du nerf vestibulocochléaire. Ces informations sont ensuite transmises rostralement jusqu’au cortex auditif dans le lobe temporal (majoritairement en controlatéral) pour la perception consciente du son, après un relais dans le thalamus (corps géniculé médial).

La cochlée est un petit organe complexe, en forme de spirale, située dans la partie pétreuse de l’os temporal. Elle renferme des canaux contenant de l’endolymphe dans laquelle baignent des cellules ciliaires, et reposant sur une membrane basale (constituant l’organe de Corti). Ces cellules sont mises en mouvement par l’onde sonore, ce qui créé un contact avec la membrane tectoriale sus-jacente. C’est ce contact qui transforme l’onde mécanique en signal électrique, par les cellules ciliaires. L’endolymphe est produite par des cellules dérivant des mélanocytes (ceci pouvant expliquer certaines formes de surdité congénitale). Les sons hautes fréquences font vibrer la membrane basale à la base de la cochlée, tandis que les sons basses fréquences stimulent l’apex de la spirale cochléaire. Les chiens détectent des fréquences de 67 à 45 000 Hz. Chez le chat, le spectre est un peu plus large (45 à 65 000 Hz).

II- Origines de la surdité

On distingue deux types de surdité. La surdité dite de conduction se définit par un blocage de transmission de l’onde sonore mécanique. Elle peut être (rarement) congénitale (atrésie du conduit auditif externe), ou le plus souvent acquise (otite externe/moyenne, polypes, tumeurs…), et ne sera pas abordée ici. La surdité dite neurosensorielle se caractérise par un défaut de transformation de l’onde mécanique en signal électrique, moins souvent par un défaut de transmission du signal le long des voies auditives (la surdité étant rarement un signe clinique isolé ou d’appel dans ce contexte). La surdité neurosensorielle est très souvent d’origine héréditaire, d’où l’intérêt du dépistage dans les races les plus concernées. Elle peut parfois être acquise (otite interne, produits ototoxiques, presbyacousie chez les patients âgés).

III- Aspects cliniques de la surdité

L’évaluation clinique de la surdité chez un animal peut être très subjective. Comme souvent sur les réponses liées à un stimulus « externe », cela nécessite un certain degré de coopération. L’interprétation peut donc être délicate sur un animal stressé, apeuré, indifférent au bruit, ou présentant de la douleur/inconfort. Cela nécessite la production d’un stimulus auditif (soudain/bref), en dehors de son champ de vision. Il est donc souvent très difficile de repérer un animal atteint de surdité unilatérale. Lorsque l’animal présente une surdité bilatérale, il est en revanche plus simple de l’identifier.

Il est toujours important de demander des précisions sur la lignée/antécédents familiaux du patient. Il convient également d’interroger le propriétaire sur l’administration éventuelle de substances ototoxiques (topiques et/ou systémiques).

IV- Surdité neurosensorielle héréditaire

Elle est dans la majorité des cas congénitale (mises à part quelques formes tardives), i.e. présente dès la naissance. Cependant, il est très difficile de l’identifier chez un nouveau-né de quelques jours. En revanche, un chiot ou un chaton plus âgé qui reste prostré et seul, interagissant peu avec le propriétaire et/ou ses congénères, est souvent un signe de surdité bilatérale.

La forme de surdité neurosensorielle héréditaire la plus fréquente chez le chien et le chat est une dégénérescence cochléo-sacculaire pigmento-dépendante. Elle peut être uni ou bilatérale, à des degrés d’intensité variable. Elle est rencontrée le plus souvent chez les animaux présentant une pigmentation blanche ou diluée. Dans certaines races, cela est associé au pelage dit « merle » (notamment les Berges australiens). Cela est lié à un déficit des mélanocytes présents dans la cochlée (cf. supra). Parmi les races canines emblématiques affectées par cette maladie on peut citer le Dalmatien, le Dogue argentin, le Bull Terrier. Chez le chat, ce sont principalement les individus pure race, présentant un pelage blanc et des yeux de couleur bleue qui sont concernés, avec une prévalence combinée d’environ 50%. Certaines races sont prédisposées : Norvégien, Maine Coon et Angora Turc (prévalence entre 11 et 18%).

Certaines surdités neurosensorielles héréditaires cochléosaculaires non pigmento-dépendantes sont d’apparition plus tardive (3-4 semaines). Cela est décrit chez le Beauceron.

Enfin, certaines surdités héréditaires sont dites neuroépithéliales et s’accompagnent la plupart du temps de signes vestibulaires (ces formes sont dites syndromiques). Elle est décrite chez le Dobermann et le Labrador.

V- Test de l’audition dans le cadre d’un dépistage

Comme évoqué précédemment, l’évaluation clinique de la surdité peut être subjective et délicate. L’évaluation de l’audition chez le jeune patient passe donc par des méthodes objectives et fiables.

L’étude des potentiels évoqués auditifs (PEA) est une méthode électrodiagnostique, qui est la plus utilisée en routine. Elle permet une évaluation précise de l’acuité auditive d’un animal. L’aspect du tracé et ses anomalies permet en outre d’affiner l’origine précise de la surdité. Sur des chiots/chatons calmes, le test peut être réalisé sur patient vigile à l’aide d’un casque audio. Sur des jeunes patients plus agités, une anesthésie générale/sédation légère est en revanche nécessaire. Des petits écouteurs en mousse sont alors insérés dans les conduits auditifs externes. L’enregistrement des PEA se fait à l’aide de petites aiguillesplacées en sous-cutané sur le sommet du crâne, le chanfrein et la base de l’oreille à tester. Lors du test, un bruit de fond est émis dans l’oreille controlatérale afin de ne pas être parasité par cette dernière. Un stimulus auditif est délivré à une fréquence donnée (généralement autour de 1000 Hz). L’intensité de stimulation démarre en général autour de 90 ou 100dBnHL. Le test permet d’une part de déterminer si l’animal entend ou pas. Il permet aussi d’évaluer le seuil d’audition de l’animal, déterminé en diminuant progressivement l’intensité de stimulation et en observant la disparition du tracé. Le tracé enregistré est constitué de différents pics, correspondant chacun à une structure particulière des voies auditives, depuis le nerf vestibulocochléaire, jusqu’aux structures plus profondes dans le tronc cérébral. En cas de surdité neurosensorielle, le tracé caractéristique est un tracé plat dans son intégralité.

L’étude des émissions oto-acoustiques (EOA) est de plus en plus utilisée en pratique courante, pour sa facilité d’utilisation. Elle permet une évaluation plus grossière de la capacité auditive. Cette méthode repose sur l’enregistrement des émissions oto-acoustiques émises par certaines cellules de la cochlée en réponse à un son. Cela nécessite un dispositif relativement accessible et facile d’utilisation.

Pour ces deux tests, il convient de toujours vérifier au préalable l’intégrité et l’absence de débris/lésion dans les conduits auditifs externes, à l’aide d’un otoscope.

VI- Apport des tests génétiques

De nombreuses mutations génétiques ont été identifiées pour les différentes formes de surdité neurosensorielle. À date, il existe des tests génétiques pour le dépistage certaines formes de surdité neurosensorielle, auprès de laboratoires tels que Laboklin ou Antagène (disponibilité des tests et des races concernées mise à jour régulièrement, à mesure des publications scientifiques en la matière).

Enfin l’on notera que les modalités d’imagerie en coupe (scanner/IRM) des cavités tympaniques/oreilles internes/voies auditives cérébrales sont rarement utilisées à des fins de dépistage, mais plutôt pour l’exploration d’une surdité acquise (et a fortiori suspectée comme étant de conduction).

Bibliographie

  1. Strain, G. M. Hearing disorders in cats. J. Feline Med. Surg. 19, 276–287 (2017).
  2. Thomson, C. & Hahn, C. Veterinary Neuroanatomy. Saunders Limited, 2012.
  3. Strain, G. M. The Genetics of Deafness in Domestic Animals. Front. Vet. Sci. 2, 16–20 (2015).
  4. Mari, L., Freeman, J., Dijk, J. V. & Risio, L. D. Prevalence of congenital sensorineural deafness in a population of client-owned purebred kittens in the United Kingdom. J Vet Intern Med 42, 1179–7 (2019).
Pas de conflit d'intérêt déclaré.